Page 118 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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Après s'être gratté la nuque, comme pour mieux réfléchir,
Louis-Philippe ajouta :
-J'sus prêt à t'aider pour un mois ou deux. Disons que tu
me fournis le foin et le grain qu'il faut et je garde tes vaches
jusqu'à ce que tu trouves à les vendre. Quant aux poules ...
Avant même que Baptiste ait le temps de réagir à cette pro-
position, il lui demanda tout de go :
-Est-ce indiscret de te demander où est-ce que t'as l'intention
de t'installer ?
- J'ai acheté le petit bungalow à Jean-Louis Pitre, le garçon
à Pierre.
-Et Jean-Louis, qu'est-ce qu'il est devenu ?
-Parti pour la Côte-Nord depuis l'automne, comme plusieurs
autres. Un travail dans les mines, si j'ai ben compris. I paraît
qu'$a paye, et pis sa femme n'est pas ennuyeuse.
L'oeil sombre, Louis-Philippe regardait la voiture s'éloigner,
puis disparaître dans la tranchée blanche du chemin de traverse.
Marie devinait facilement la pensée de l'homme. C'était la quatrième
famille à quitter Terre-Haute depuis l'automne. II n'en restait plus
que neuf.
La semaine suivante, Marie recevait une lettre de Julie. En
post-scriptum, elle lui apprenait que le cousin Honoré venait d'être
condamné à trois mois de prison pour fraude. Le montant était
peu considérable : une fraude à la mesure de l'individu !
Pendant cinq ou six jours, le thermomètre s'était maintenu
au-dessous du zéro. Ils n'avaient vu personne depuis la visite inat-
tendue de Baptiste Plourde et de sa femme. Pour se calmer les
nerfs, Marie ne cessait de tricoter. Louis-Philippe se sentait gagner
par l'abattement. Un soir, malgré le vent de glace qui soufflait du
nord, il décida d'aller faire un tour chez le voisin. II trouva toute
la maisonnée en bonne santé, mais Zidore et sa femme ne lui cachè-
rent pas leur appréhension. II comprit qu'eux aussi seraient bientôt
mûrs pour subir la a relocalisation 2.