Page 314 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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jeune homme qui, travaillant de l'autre côté de la rivière,
                                   aurait pu nous secourir dès le commencement, s'il n'eût
                                   pensé que, sachant nager tous deux, nous nous amusions à
                                   jouer dans la rivière. Mon frère vomit beaucoup d'eau;
                                   pour moi je n'en avais pas avalé une seule goutte.
                                     J'ai souvent failli me noyer par mes imprudences, mais
                                   je n'ai jamais couru un si grand danger.
                                     Le proverbe populaire: beau nageur, beau noyeur, est
                                   vrai à certains égards: nous étions tous alors d'une témérité
                                   qui me fait frémir maintenant. Si l'un de nous disait: «Vous
                                   n'êtes pas capables de nager jusqu'à ce navire ancré dans la
                                  rade lt, rien n'empêchait les autres d'accepter le défi, ni la
                                   marée contraire, ni le vent, ni même la tempête. Il ne faut
                                   pas néanmoins en conclure que l'art de la natation doit être
                                   négligé. En voici encore un exemple entre mille.
                                     Je me promenais, étant enfant, sur le fleuve Saint-Laurent
                                   dans un bien petit canot avec un de mes jeunes amis, lors-
                                   qu'en nous penchant tous deux par inadvertance sur un des
                                  bords de la légère embarcation, nous la fîmes chavirer. Ren-
                                  versés en arrière, nous fîmes une culbute qui nous procura
                                  l'agrément de faire la connaissance de quelques poissons, à
                                  deux ou trois brasses de profondeur, avant de reprendre
                                  l'équilibre pour remonter à la surface de l'eau; mais, loin
                                  d'être déconcertés, ce ne fut qu'un nouveau surcroît de
                                  jouissance pour nous. Aussi notre premier mouvement fut
                                  de rire aux éclats en nageant vers notre canot et vers nos
                                  chapeaux que le courant emportait. Après mûre délibéra-
                                  tion, nous convînmes de faire lin paquet de nos hardes,
                                  savoir: gilets, chaussures, chapeaux; et, à l'aide de nos cor-
                                  dons de souliers, de les déposer sur la quille de la petite
                                  barque, transformée en dos d'âne, avec son bât pour l'occa-
                                  sion. La marée aidant, nous réussîmes à remorquer le canot
                                  jusqu'à terre. Nous n'avancions guère à la vérité, et ça nous
                                  prit beaucoup de temps; mais nous avions un endroit de
                                  refuge, en nous accrochant à la barque quand nous étions
                                  fatigués.
                                    Voilà un exemple frappant de l'utilité de savoir nager: ce
                                  qui ne fut pour nous qu'une partie de plaisir aurait proba-
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