Page 151 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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-1\ serait bien à souhaiter, reprit le bon gentilhomme,
                                        que Louis XV eût laissé Marie-Thérèse se débattre avec la
                                        Prusse, et nous eût moins négligés.
                                          -  11 sied peu à un jeune homme comme moi, dit de
                                        Locheill, de me mêler à vos graves débats; mais, à défaut
                                        d'expérience, l'histoire viendra à mon aide. Défiez-vous des
                                        Anglais, défiez-vous d'un gouvernement qui a toujours les
                                        yeux ouverts sur les intérêts de ses colonies, partant sur
                                        les intérêts de l'empire britannique; défiez-vous d'une na-
                                        tion qui a la ténacité du bull-dog. Si la conquête du Canada
                                        lui est nécessaire, elle ne perdra jamais cet objet de vue,
                                        n'importe à quels sacrifices: témoin ma malheureuse patrie.
                                          -  Bah! s'écria mon oncle Raoul, des Ecossais 1
                                          De Locheill se mit à rire.
                                          -  Doucement, mon cher oncle, dit le bon gentilhomme,
                                        et, pour me servir de votre maxime favorite, lorsque vous
                                        retirez les rentes de celte seigneurie: c Rendons à César ce
                                        qui appartient à César;» j'ai beaucoup étudié l'histoire
                                        d'Ecosse, et je puis vous certifier que les Ecossais ne le
                                        cèdent ni en valeur ni en patriotisme à aucune nation du
                                        monde connu, ancienne ou moderne.
                                          -  Vous voyez bien, repartit le chevalier, que j'ai voulu
                                        seulement faire endêver tant soit peu mon second neveu
                                        de Locheill: car, Dieu merci, fit-il en se rengorgeant, nous
                                        nous flattons de connaître l'histoire. Arché sait très bien la
                                        haute estime que j'ai pour ses compatriotes, et l'hommage
                                        que j'ai toujours rendu à leur bouillant courage.
                                          -  Oui, mon cher oncle, et je vous en remercie, dit Arché
                                        en lui serrant la main. Mais défiez-vous des Anglais; défiez-
                                        vous de leur persévérance; ça sera le delenda est Carthago
                                        des Romains.
                                          -  Tant mieux, dit Jules; merci de leur persévérance; ils
                                        me donneront alors l'occasion de revenir au Canada avec
                                        mon régiment. Que ne puis-je faire mes premières armes con-
                                        tre eux ici, dans la Nouvelle-France, sur cette terre que
                                        j'affectionne et qui renferme ce que j'ai de plus cher au
                                        monde! Tu reviendras avec moi, mon frère Arché, et tu
                                        prendras ta revanche sur cet hémisphère, de tout ce que tu
                                        as souffert dans ta patrie.
                                          -  De tout mon cœur, s'écria Arché en serrant avec force
                                        le manche de son couteau, comme s'il eût tenu en main la
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