Page 154 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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Elle perdit pourtant un jour l'enfant qu'elle idolâtrait;
                                  et, comme la Rachel de l'Ecriture, elle ne voulait pas être
                                  consolée. Elle passait une partie de la journée dans le cime-
                                  tière, enlaçant de ses deux bras la petite tombe où dormait
                                  son enfant. Elle l'appelait de sa voix la plus tendre, et folle
                                  de douleur, elle s'écriait:
                                    -  Emma! ma chère Emma! c'est ta mère qui vient te
                                  chercher pour te porter dans ton petit berceau, où tu seras
                                  couchée si chaudement! Emma! ma chère Emma! tu dois
                                  avoir bien froid sous cette terre humide!
                                    Et elle prêtait l'oreille en la collant sur la pierre glacée,
                                  comme si elle eût attendu une réponse. Elle tressaillait au
                                  moindre bruit, et se prenait à sangloter en découvrant que
                                  c'étaient les murmures du saule pleureur agité par l'aquilon.
                                  Et les passants disaient:
                                    -  L'herbe du cimetière, sans cesse arrosée par les larmes
                                  de la pauvre mère, devrait être toujours verte, mais ses lar-
                                  mes sont si amères qu'elles la dessèchent comme le soleil
                                  ardent du midi après une forte averse.
                                     Elle pleurait assise sur les bords du ruisseau où elle l'avait
                                  menée si souvent jouer avec les cailloux et les coquiIles du
                                   rivage; où elle avait lavé tant de fois ses petits pieds dans ses
                                  ondes pures et limpides. Et les passants disaient:
                                    -  La pauvre mère verse tant de larmes qu'elle augmente
                                   le cours du ruisseau!
                                     Elle rentrait chez elle pour pleurer dans toutes les cham-
                                   bres où elle avait été témoin des ébats de son enfant. Elle
                                   ouvrait une valise dans laquelle elle conservait précieusement
                                   tout ce qui lui avait appartenu: ses hardes, ses jouets, la
                                   petite coupe de vermeil dans laquelle elle lui avait donné à
                                   boire pour la dernière fois. Elle saisissait d'une main con-
                                   vulsive un de ses petits souliers, l'embrassait avec passion,
                                   et ses sanglots auraient attendri un cœur de diamant (h).
                                     Elle passait une partie de la journée dans l'église du viIlage
                                   à prier, à supplier Dieu de faire un miracle, un seul miracle
                                   pour elle: de lui rendre son enfant J Et la voix de Dieu
                                   semblait lui répondre:
                                     -  Comme le saint roi David, tu iras trouver ton enfant un
                                   jour; mais lui ne retournera jamais vers toi.
                                     Elle s'écria alors:
                                     _ Quand donc, mon Dieu! quand aurai-je ce bonheur?
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