Page 16 - La Société canadienne d'histoire de l'Église catholique - Rapport 1961
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Lorsqu'elle  vint  demeurer  à  Montréal,  madame  Cardinal,  ainsi  que
                                  see  enfants,  fut  I'objd  des  sympa~hies de  madame  Gameliii.   r Je  me
                                  rappelle,  dit  encore madame  hlariori,  que  ma  mère,  mes  sœurs  et  moi
                                  nous  allions  parfois  dîner  cha madame  Gamelin  à  ea  demeure,  rue
                                  Sainte-Caiherine, r
                                      Dès  les premiers  jours  de  janvier  18.39,  plusieurs  autr~ patriotes
                                  furent  condamnés.  Le  tribunal  qui  sévissait  ainsi  eontte  les  malbeu-
                                  reur prisonniers  politiqueb  ne  tolérait  aucune  eommunicalion  entre  lee
                                  condamnés  à  mort  ei leurs  parenta  ou  amis,  excepté  la veille  de  l'exé-
                                  cution.  Madarne Jacques Longlin.  de  Saint-Constant. venue  pour  visiter
                                  son  mari  condamné  le  10  janvier,  ne  put  en  obtenir  Ia  permission.
                                  ElIe  amenait  avec  elle  sa  fille,  Sopliie,  âgée  de  treize  ans.  Dans  sa
                                  détresse, la pauvre femme a recours à niadame Ganielin.  Celb-ei, afin de
                                  la  consoler  autant  qu'elle  peut,  met  un  panier  au  bras de  la  petite,  ee
                                  charge  elle-mênie de  dinérents  objels  et  s'acliemine  vers  la  prison  avec
                                  sa mignonne  compagne,  Obligée de traverser la cour  entre deux rangées
                                  de soldats.  l'enfant  tremble de  tous  ses membres;  son  charitable  guide
                                  la  rassure  et  la  remet  à  son  père  qui  n'en  peut  croire ses yeux.  Heu-
                                  reuse de ce bonheur  dont elle a  éké l'instrument, madanie Gamelin  lais^
                                  eeuls  la  petitc  et  son père  et  s'en  va  distribuer  provisions  et  messages
                                  aux  autres  prisonniers.
                                      Cette  petite  Sophie  Longin,  devenue  Sœur  de la  Providence  sous
                                  le nom  de Sœur Jean-Baptiste, a  raconté maintes  fois eet épisode de Ion
                                  enfance.  Elle est décédée  le 13 août  1924, à  notre hôpital Saint-Eusébe,
                                  Joliette,  dans sa  quatre-vingt-dixiènie  annèe  après  avoir  passé  soimanie-
                                  neuf  ans  dans  I'exercioe  dm  Euvres  de  chorité  les  plus  méritoires.
                                  Il  nous  est  bien  permis de croire  que  l'attitude  toute  de  bonté  et  de
                                  charité  de madame GameIin  envers  la  famille  Longtin  contribua,  dans
                                  une large  mesure,  à  sa  vocation  de  Servante  des  Pauvrm.
                                      La  dernière victime des événements  ui,  depuis  1837, endeuillaient
                                  tenl  de familles  canidiennea-franîaism,  ?ut  lc  notaire  Franîois-Maricd
                                  Thomas-Chevalier de Lorimier.  Madame Gamelin, amie de la famille de
                                  Lorimier, partagea  sa douloureuse  diction.  Madame de Lorimier  ainsi
                                  que  ses  filles,  Lkopoldine  et  Stéphanie,  passa  la  dernière  partie  de  sa
                                  vie  à  L'Assomption.  Les  Srrurs  de la Providence  la  visitaient  souvent
                                  et  se  plaisaient  à  l'entendre  évoquer  le  souvenir  de  leur  Fondatriee
                                  et de son in btipable charité.  Madame de Lorimier  était âgée de 79 ans
                                  lorsqu'elle  décéda  à  L'Assomption,  le  6 déeenibre  1891.  Sa  fille,  Go-
                                  poldine  mourait  le  12  mars  1898,  i  l'ige  de  65  ans.  Sa  sœnr,  Sté-
                                  phanie,  demeurée  seule,  * retira  à  notre  Hospiee  Notre-Dame,  L'As-
                                  somption,  où  elle  décédait  à  6011  tour,  le 5 mars  19û4.
                                      Plusieurs autres  patriotes,  dont  Jacques Longtin  et  son  fils,  Moïse,
                                  furent  déporrés  en  Australie.  L'un  d'eux,  François-Xavier Prieur,  dans
                                  ses * Mirnoires  d'un  Prisonnier  politiqne  a,  Cerit en  parlant de madenie
                                  Gamelin :  s C'était  une  magnifique  iemrne  au  langage  sympathique
                                  et  aux manières rlistinguées.  Sa  eharité était  inépisahle. . Ces simples
                                  parole4  dans  leur  brièveté,  en  dieent  long  sur  la  réputation  de  bien-
                                  faisance de  madame  Gamelin.
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