Page 11 - La Société canadienne d'histoire de l'Église catholique - Rapport 1961
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MQre Gamelin et le Service Social

                                   En  venant vous entretenir de  Mère Carnelin  et  le Service Social 1,
                               je  n'ai  pas  l'intention  de  présenier  une  conférence savante,  fortement
                               charpentée,  à  base  de  documents  et  étayée  de  nombreuses  référent-
                               ce que,  d'ailleurs,  e  n'aurais  pu  faire.  Je veux,  tout  simplement,  son-
                               ligner  un  aspect d e  l'activi~é charitable  de  notre  vénérée  Mère  Fon-
                               datrice  et  lui  offrir,  en  même  tempe,  un  filial hommage  d'admiration
                               et  de  gatitude.
                                   Ce  ne sera  une  surprix pour  personne,  nous semble-t-il, que  d'en-
                               tendre une Sœur de la Providence parler de la fondatrice de sou  Insiitut
                               et  du  Meau  qu'elle  a  irnprimE  à  la  charité  dans  le  Montréal  de  la
                               derniére  moitié  du  XJX'  siècle.
                                   Ce  XIX'  eiècle  venait  à  peine  de  naître  que  Marie-ErniIi~Eugèna
                               Tavernier  ouvrait  les  yeux  à  la  lumiére.  Il  ent  une  ironie  des  nom
                               comme  il  en  mt une  des cboses  : la  famille  dans  laquelle  l'enfant  vient
                               prendre  place  porte le  nom de  c Tavernier  dit  Sanspitié W.  Son  grand-
                                 re,  Julien  Tavernier,  veuu  de Picardie  à  Montréal,  était ~ergent dans
                               t Corn  agnie  du  chevalier  de  Lacorne.  11  tombait  glorieusement  au
                               ehamp  s'honneur  en  juillet  1756,  dans les  euvirona  du lac  Charnplaia
                               laimant  une  veuve  et  quatre  enfants  dont  le  plus  jeune,  Antoine,  fut
                               Ie  père  de  notre  Fondatrice.
                                   Dée  es plus  jeunes  années,  la  petite  semble  vouloir  faire  mentir
                               le  nom  de  Sanspitié r  amolé  à  celui  de  r Tavernier  B.  La précocité
                               de na  compassion  euvers  les  pauvres  fait  l'étonnement  de  son  entou-
                               rage.  Sa  maman,  heureu*  de  constater  les  heiies  dispositions  da  am
                               fillette,  se  plaît  à  faire  passer  par  ses  mains  enfantines,  I'aumône
                               deetinée  au  mendiant  qui  la  sollicite  pour  l'amour  du  bon  Dieu.
                                   Or,  KU matin, hilie voit venir  dans le cbemin montant qui conduit
                               à  Ia  maison  paternelle,  un  vieillard  qui  s'avance  pénihlment,  appuyii
                               mir  Bon  bâton,  Eiie ee hâte  à  sa rencontra  avec  son  petit panier  plein
                               de provjsion~ ¶u'elle  jette  dans la grande  besace  que le mendiant  ouvre
                               devant  elle.  En  voyant  sa  légère  offrande  s'abîmer  dans  le  fond  du
                               sac,  elie  se met  à  leurer  et  revient  vers aa  maman  : r Maman,  maman,
                               le  iae n'at  pi0  P.i. ! =  Celleci  essaie  de  lui  faire comprendre,  pour
                              la  cousaler, que T e  pauvre  coinmence sa  tournée  quotidienne et  que,  à
                               son  retour,  le  soir,  il  aura  su~~inment rainas&  pour  subvenir  aux
                               besoins  de  sa  famille.  Mais,  pour  eon  cœur  compatissant,  la  besace
                               du pauvre lui paraît  déjà,  et lui  paraîtra  toujours,  trop grande,, jusqu'h
                               ce  qu'elle  lui  ait  donné  ses  biena,  sa  santé,  sa  vie,  tous  les tresors  de
                               son  esprit  et  de  son  mur.
                                  A  eeiie  que  le  Seigneur  destinait  H  fonder  une  communauté  oh
                              tout-  les miaères  humaines  trouveraient  refuge,  les épreuves  ne furent
                              pae ménagées.  La petite  n'a  pas  encore  see  quatre  ans  ¶u'elle  perd  M
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