Page 12 - La Société canadienne d'histoire de l'Église catholique - Rapport 1961
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mire.  Plus  tard,  elle  avait  alors  dix-huit  ana,  son  frère  Fran~ois,
                                  devenu  veuf,  lui  confie  la  tenue  de  sa  maison.  Ce  rôle  de  rrii.nagère
                                  lui  plaît  d'autant  plus  qu'EmjLie  trouve,  dans ce frère aîné,  uii  ami des
                                 pauvres  qui  lui permet  d'assister  autant  de  mallieureux  qu'il  s'en  pré-
                                  muterait  chez  lui.   4 Bon  sang ue peut  nientir  i, dit le proverbe.  D'une
                                  géuération  à  l'autre,  lw  Tavernier  et  lenrs  parents  ont  toujours  fait
                                  preuve  d'une  tendre  rherité  envers  leil  déshérités de  la  vie.  Francois,
                                  aussi  eensible  d'âme  ue  bouillant  da  caractère,  voit  avec  plaisir  sa
                                  elientkh  de  midreux  joubler,  et  méme tripler,  grâce  à  rs jeune  mur.
                                      Dans  une  petite  piiice  atteuani  à  Ia  cnisine  et  que  mademoiselle
                                  Tavernier  appelle  ~entiinent son  cabfnet pnrricnlier,  elle  aménage  une
                                  5aIle  à  manger  à  l'usage  exclusif  de  ses amis de choix.  C'est  là que lm
                                  panvres  s'asseoient  autour  d'nne  grande  table  que  l'aimable  jeune  fille
                                  nomme la  talile du roi.  Que cet te appeilation prouve bien le sens chrétien
                                  de celle  qui sert  elle-même, avec  une reapeetueuse  tendresse,  les  preférés
                                  du  Seigneur !  Il  nous  ~t  doux de eroire  que  la  prière  reconnaiesante
                                  de  ces rrialheureux  lui  aura  obtenu  Urie  large  part  des grâces  de clioix
                                  qui  l'ont  conduite  jusqu'à  la  fondation  d'un  Institut  particulièrement
                                  eonsacré  aux  muvres  de  charité.
                                      Mariée  à  23  ans,  mademoiselle  Tavernier  trouve  e.n  son  élioux.
                                  M. Jeau-Baptiste Gamelin, nn errur porté, eomnie le sien, à la  pitié eiivere
                                  les  malheureux.  11  laisse  done  à  sa  jeunr  Épouse  toute  liberté  de  leur
                                  venir  en  aide.  d'autaut  plus  que  la  modeste  aisance  dont  il  jouit  lui
                                  permet  de répondre aux  exigences de leur  commun  amanr  des paurrrs.
                                      Le  bonhenr,  tous  en  font  plus  ou  moins  I'expérienee,  n'est  pas
                                  de  la  terre.  Après  quatre  ans  à  peine  d'une  vie  conjugale  très  heu-
                                  reuse  madame  Gamelin  voit  mourir  Let  époux  qui  l'a  entourk  d'une
                                  tendresse  généreuse  et  discrète.  Parini  les  biens  dont  il  la  fait  héri-
                                  tière,  il  est  un  Iey pour  le  moins  surprenant : c'est  celui  d'un  idiot
                                  qui,  dans  une  eirconstanee  périllense,  a  sauvé  par  ses  eris,  la  vie  de
                                  M.  Gamelin.  Celui-ci,  en  retour,  s'est  chargé,  bien  avant  son  mariage,
                                  de pourvoir  aux  bmoins  de  ce  pauvre  être  et  de  sa  mere.  Voyant  sa
                                  fin  approeh~r, hl.  Garrielin  dit  à  sa  femnie  : a Prenez  soin de  lui  pn
                                  souvenir  de moi  et de mon  amour.  w  Et  Dieu  sait  avec  quelle  dklicate
                                  exactitude  la  jeune  veuve  a  exécuté  eette  dernière  volonté,  jusqu'à  Ia
                                  mort  du pauvre  Dodais.  Dens  notre  communauti.,  ee  Dodais  - c'est
                                  le seul  nom  que nous  lui  eonnaissons  - est  rey;ardé comrrie  la  eellnle
                                  initiale  de  l'œuvre  qui  s'aeconiplit,   rés  de  eent  ans,  à  I'im-
                                                                  depui"  u  Mont-Providence  où  les
                                  mense  hôpital  SaintJean-de-Dieu  et  à  eelui
                                   Diidais . se chiffrent  par  centaines.
                                      Un  dernier  enfant  re5tait  à  madame  Gamelin,  les  drux  autres  lai
                                  ayant été  ravi.  presqne  des  le  berceau.  Diz  mois après  le  décès de son
                                  mari, cc petit  ctre sur lequel s'étaient reportées tontes ses affections, qiiit-
                                  tait aussi  la  terre.  Ce  qu'elle  dpruuva d'amictiun  à la  mort  de  cet enfant
                                  bien-aime.  ellc-même  nous  le  dit  dans  ses notes  de  retraite  dc  1850.
                                  moins d'un  an avant  sa  murt.  Elle  nous apprend  en  même  temps  corn-
                                  ment  elle parvint  alors à se  r6signer  à  la volonté de Dieu : a  Dana  cette
                                  menle  année,  M.  Saint-Picrre  ( p retre  de  Saint-Sulpice,  son  dircctenr
                                  spirituel\  me fit  présent  d'une  irnage  de  Notre-Dame-dcs.Sept-Doulcurs
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