Page 429 - Annuaire Statistique Québec - 1918
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388                 LA COLONISATION DE LA

          nos importations.   Otez-nous le bois, et nous sommes tout-à-coup ré-
          duits à moins de la moitié de notre consommation d'articles importés.
          plus de la moitié des revenus de la province disparaissent.  Que tous les
          habitans de ces colonies regardent autour d'eux, et qu'ils voient s'ils
          peuvent se passer de plus de la moitié des marchandises étrangères qu'ils
          consomment actuellement. Qu'ils ne se fient pas sur leur argent, car si
          tout l'argent de la Province était envoyé en Angleterre, IL NE PAIERAIT
          PAS L'IMPORTAiloN D'UNE SEULE ANNEE.         Qu'ils se souviennent que,
          nos exportations diminuées, notre argent le sera aussi.  Nous pourrons
          bien répandre du papier, lâcher quelques CERFS-VOLANS de plus, essayer
          encore un peu de crédit: mais nous ne serons pas mieux pour tout cela;
          ce dernier moyen, surtout, est déjà presqu'épuisé.
               Si la ruine du commerce des bois se consomme sans qu'on nous donne
          la IJBERTE DU COMMERCE, tant rabattue, est-il à croire que nous reste-
          rons les bras croisés, tandis que nous verrons nos familles et notre pays
          retomber dans un état de misère dont les travaux de deux siècles nous
          ont à peine tirés?  Nous ne violerons pas les lois de l'Angleterre; nous
          ne nous révolterons pas contre son autorité; nous ne nous liguerons pas
          avec ses ennemis; mais, nous ne pourrons plus mettre de confiance dans
          un commerce qui aujourd'hui nous élève à une richesse imaginaire, et
          nous replonge demain dans une misère véritable.      Il faudra que nous
          apprenions à vivre selon nos moyens; que dans nos affaires publiques
          aussi bien que privées, nous pratiquions une stricte économie, nous sou-
          venant que plus de la moitié de nos moyens ne sont plus.   Il faudra que
          nous mettions le restant de nos capitaux à établir des manufactures pour
          les objets dont nous ne saurions nous passer; il faudra abandonner le
          commerce des bois; il faudra que nos cultivateurs fassent moins de fro-
          ment, plus de lin, et qu'ils élèvent plus de moutons.  Il faudra que toute
          chose étrangère soit bannie de nos maisons, de nos tables et de nos habil-
          lemens.   Avec les facilités de communication naturelles que fournissent
          nos rivières, et nos lacs, avec un sol fertile, même sous notre climat rigou-
          reux, un peuple industrieux et frugal saura bientôt vaincre les premières
          difficultés, et parvenir à un degré de prospérité permanente, qui le rendra
          indépendant de tous secours étrangers (1)."
               La Gazette de Québec annonçait dans le même temps que les dernières
          nouvelles relatives au commerce du bois, reçues d'Angleterre, augmen-
          taient l'alarme générale.  "Dans l'état d'incertitude où l'on est, y disait-
          on, les marchands se préparent à régler finalement les affaires de leur
          commerce, et ils craignent de s'engager dans de nouveaux contrats.
          Quelques-uns des plus grands propriétaires de moulins à scies, ont déclaré
          qu'ils étaient résolus à discontinuer leurs opérations à la fin de la saison
          actuelle.  A l'entrée d'un hiver long et rigoureux, des milliers de journa-
          liers seront ajoutés à ceux qui sont déjà dépourvus d'emploi; et quoique
          les choses nécessaires à la vie soient abondantes et à bon marché, ceux
          qui n'ont point d'argent et qui ne trouvent pas d'emploi, ne peuvent se


              (1) Gqzette de Québec. 21 .epterobre 1820.
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