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SOUS LA DOMINATION FRANÇAISE                           95

    ensemencer leurs terres, mais la trop grande abondance de pluie fit
    manquer la récolte (1).
         A l'automne lflS soldats furent envoyés dans les campagnes pour
    être logés et nourris par les habitants qui souffraient déjà beaucoup
    de la disette; à Québec, la population fut réduite à quatre onces de pain
    par jour.
         A côté du peuple qui mourrait de faim, Bigot et ses associés Cadet,
    Péan et Deschenaux menaient grand train de vie.        Cadet avait été
    nommé munitionnaire général et chargé de fournir les vivres pour les
    troupes régulières et celles de la colonie.
        Il demanda en entrant en fonction une avance de deux millions
    de livres; puis avec l'acquiescement de l'intendant, envoya des person-
    nages de bas étage requisitionner dans les campagnes le blé qu'on trans-
    portait à l'étranger, en secret; le surplus était expédié au magasin que
    Bigot avait fait construire près du palais de l'intendance, on y vendit
    jusqu'à vingt-deux livres le minot le blé que l'on payait à l'habitant
    six livres le minot (2).
         En même temps Cadet avec le concours de Pennisseault et de Maurin
    qu'il avait mis à la tête de son magasin à Montréal, s'emparait de toutes
    les fournitures des postes au-dessus de Montréal qu'il revendait au roi
    le double du prix. Pour comble de malheur l'hiver de 1757-1758 fut
    d'une rigueur excessive; à Québec, de pauvres refugiés acadiens furent
    trouvés morts de froid dans leur lit.
        Au mois de décembre 1757, le bœuf manqua et la population de
    Québec et de Montréal fut réduite à la seule viande de cheval.       Au
    premier avril 1758, la ration de pain fut réduite à deux onces (3).
        Heureusement que vers la fin de mai, huit vaisseaux chargés de
    provisions entrèrent dans le port de Québec.   Ce secours attendu avec
    impatience ranima le courage de la population et des troupes.
        La glorieuse victoire de Carillon (8 juillet 1758) n'eut pas de lende-
    main.   Louisbourg succombe le 28 juillet, après un siège mémorable
   .et sa perte entraine celle du Cap-Breton et de l'Ile St-Jean.  Le général
    Bradstreet détruit le fort Frontenac (25 aout 1758) et Forbes chasse les
    Français du fort Duquesne, sur les ruines duquel il élève le fort Pitts-
    burg.
        Malgré les victoires de Montcalm, l'avantage restait aux Anglais;


        (1)-A.C.C.G.  Vaudreuil au ministre, 12 septembre 1757, vol. 102, Fol. 106.
        (2)-MémoireB Bur leB affaireB du Canada, pp. 63 et Beq.
        (3)-"Les expressions me manquent pour vous décrire nos malheurs. LeB animaux commencent
   .à manquer, les boucher~ ne peuvent pas fournir le quart de bœuf néceBsaire pour la subsistance des habi-
   tants de cette ville, quoiqu'ils en donnent un prix exorbitant; sans volaille, sans légume, sans mouton.
   Bans veau, nous sommes 11 la veille de mourir de faim.-Pour suppléer au défaut du pain, du bœuf et
   .des autres denrées nécessaires 11 la vie notre intendant a fait acheter 12 à 15 cents chevaux qu'il a fait
   distribuer aux pauvres de cette ville à un prix fort au-dessous de ce qu'ils avaient coûté au roi.  Il fait
   .distribuer maintenant aux mêmes un quarteron de lard et une demie livre de morue par jour, mais cela
   ne peut durer longtemps.  Les ouvriers, journaliers et artisanB exténués par la faim ne peuvent absolu-
   ment plus travailler.  liB Bont Bi faibles qu'ils peuvent 11 peine se soutenir."  (Doreil, commiBsaire de la
   guerre, au ministre de la marine, 19 mai 1758. A.C.C.G., Vol. 103, fol. 409.)  Beaucoup de gens,ajoute
   Bougainville, ne vivent que de pêche et jeûnent quand ils ne prennent rien.  Quelques habitants sont
   réduits à vivre cl'herbes.
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