Page 18 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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-Je  sais comme tu peux être attaché à ce pays et je  comprends
                                 qu'il  te  soit  pénible  de  t'en  arracher.  II  faudra  tout  de  même  se
                                 résigner  à  l'inévitable.  Il  faut  croire  que  les  paroisses  et  les  pays,
                                 ça  doit  mourir,  comme  les  hommes.
                                     Alors  que Marie  se dirigeait vers Ia  chambre  à  coucher,  Louis-
                                 Philippe jeta  instinctivement  un  regard  à la  pendule.
                                     -Di  heures  el  demie  déjà !  Dis  donc,  je  n'ai  pas  vu  Pierre
                                 de  la  journée.  Où  peut-il  être  passé ?  C'est  pourtant  samedi !
                                     Après  avoir  ouvert  la  porte,  la  femme  se  retourna  pour  Iui
                                 répondre :

                                     -II   est  allé aider  le  jeune  André  Daigie  à  réparer  sa  moto ;
                                 ils  sont  ensuite  descendus  à  La  Morendière.  Le  village  les  attire,
                                 ça  se  comprend : il y  a la  salle de quilles,  le  restaurant  st la  disco-
                                 thèque  où ils  peuvent  rencontrer  des  amis.
                                     -Comme    les  autres, il  n'est  pIus d'ici  !

                                     -Avoue  que pour des  adolescents, il  ne  reste  pas gtand~hose
                                 d'intéressant  à Terre-Haute.  Ils sont à peine  une  dizaine,  et presque
                                 tous des garçons.  C'est  normal qu'ils cherchent  à rencontrer les filles,
                                 tu  ne  crois  pas?

                                     -Eh  oui ! t'as  raison.  Ce pays défiguré  et mourant,  c'est  juste
                                 bon  pour  les  vieux  comme  nous  et  les  autres  entêtés  qui  s'y  accro-
                                 chent  désespérément.
                                     Ils  n'avaient  plus  rien  à  se  dire.  Ils  se  couchèrent.  Louis-
                                 Philippe  sombra bient6t  dans  un  sommeil  profond,  comme une  bille
                                 de  merisier  encore pleine  de  sève  qu'on  jstte  à  la  rivière.  Quant  à
                                 Marie,  elle n'avait  cessé  de  se  retourner  dans  le  lit.  Elle  pensait  à
                                 Pierre.  EUe  s'imaginait  un  accident,  elle  songeait  aux  dangers  que
                                 les  jeunes  rencontrent  dans  les  villages.

                                     Elle  réussit  à  fermer  I'œil  vers  une  heure.  après  qu'elle  eut
                                 entendu  les  marches  de  l'escalier  conduisant  à  l'étage  craquer  sous
                                des  pas  furtifs.
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