Page 86 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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Les jeunes gens fure?t, contrain~s d~ passer quel.ques, j~urs
                                    à Saint-Thomas. La debacle contmualt; les chemms etaIent
                                    inondés; le pont le plus prohe, en supposant même qu'il n'e~t
                                    pas été détruit, était à quelques lieues au sud-ouest du vIl-
                                    lage, et la pluie tombait à torrents (c). Force leur fut d'at-
                                    tendre que la rivière, libre de glaces, leur permît de passer
                                    en bateau au pied des chutes. Ils partageaiept leur temps
                                    entre la famille de Beaumont, leurs autres amIS et le pauvre
                                    Dumais, qui fit une longue maladie chez le seigneur de
                                    Beaumont, celui-ci ne voulant jamais permettre qu'on le
                                    transportât chez lui avant une parfaite guérison. Le malade
                                    leur racontait ses combats contre les Anglais et contre leurs
                                    alliés sauvages, et les mœurs et coutumes de Ces aborigènes
                                    qu'il avait beaucoup fréquentés.
                                      -  Quoique natif de Saint-Thomas, j'ai été élevé, leur dit-il
                                    un jour, dans la paroisse de Sorel. J'avais dix ans, et mon
                                    frère neuf, lorsque nous fûmes surpris dans le bois, où nous
                                    cueillions des framboises, par un parti d'Iroquois qui nous
                                    fit prisonniers. Arrivés, après une assez longue marche, à
                                    leur canot caché dans les broussaj]]es, près de la grève, ils
                                    nous transportèrent sur une des îles nombreuses qui bordent
                                    le Saint-Laurent 1, Quelqu'un donna l'alarme à ma famille,
                                    et mon père, ainsi que ses trois frères, armés jusqu'aux
                                    dents, se mirent aussitôt à leur poursuite. Ils n'étaient que
                                    quatre contre dix, mais, je puis le dire, sans me vanter, que
                                    ce sont des hommes que mon père et mes oncles, auxquels
                                     je ne conseillerais à personne de cracher au visage. Ce sont
                                     des hommes d'une bonne taille, la poitrine ouverte, et dont
                                     les épaules déplombent de six bons pouces en arrière.


                                       1. Mon bon ami feu messire Boissonnault, curé de Saint-
                                     Jean-Port-Joli, me racontait qu'il avait connu, lorsqu'il desser-
                                     vait la paroisse de Sorel, un des deux frères que leur père et
                                     leurs oncles avaient ainsi délivrés de leur captivité entre les mains
                                     d'une troupe d'Iroquois. Chaque fois que cet homme racontait
                                     cette aventure, il ne manquait jamais d'ajouter:
                                      - Mon père et mes oncles étaient des hommes auxquels je
                                     n'aurais conseillé à personne de cracher à la figure.
                                      - Et, disait monsieur Boissonnault, je n'aurais conseillé à per-
                                     sonne de faire la même insulte à mon interlocuteur, tout vieux
                                     qu'il était.
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