Page 276 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
P. 276
me lui, et que la science ne s'éteindrait pas dans la fa-
mille.
José, qui avait un tempérament de fer et des nerfs d'acier,
José qui n'avait jamais eu un instant de maladie depuis
qu'il était au monde, regardait la mort comme un événement
assez hypothétique. Un de ses amis lui disant un jour, après
le décès de ses anciens maîtres:
- Sais-tu, José, que tu as au moins quatre-vingts ans bien
sonnés, et qu'à te voir on te donnerait à peine cinquante '/
José s'appuyant sur une hanche, comme signe de stabilité,
souffla dans le tuyau de sa pipe pour en expulser un reste
de cendre, fouilla longtemps dans sa poche de culotte, de la
main qui lui restait, pour en retirer son sac à tabac, son ton-
dre et son briquet, et répliqua ensuite, sans se presser, com-
me preuve de ce qu'il allait dire:
- Je suis, comme tu sais, le frère de lait de notre défunt
capitaine; j'ai été élevé dans sa maison; je l'ai suivi dans
toutes les guerres qu'il a faites; j'ai élevé ses deux enfants; j'ai
commencé, entends-tu, sur de nouveaux frais, à prendre soin
de ses petits-enfants: eh bien 1 tant qu'un d'Haberville aura
besoin de mes services, je ne compte pas désemparer'
- Tu penses donc vivre aussi longtemps que le défunt
Maqueue-salé (Mathusalem)? fit le voisin.
- Plus longtemps encore, s'il le faut, répliqua José.
Ayant ensuite tiré de sa poche tout ce qu'il lui fallait, il
bourra sa pipe, mit dessus un morceau de tondre ardent,
et se mit à fumer en regardant son ami de l'air d'un homme
convaincu de ce qu'il avait avancé.
José tint parole pendant une douzaine d'années; mais il
avait beau se raidir contre la vieillesse, en vaquant à ses
eccupations ordinaires malgré les remontrances de ses maî-
tres, force lui fut enfin de garder la maison.
Toute la famille s'empressa autour de lui.
- Qu'as-tu, mon cher José? dit Jules.
- Bah 1 c'est la paresse, fit José, ou peut-être mon rhu-
malique (rhumatisme).
277 -