Page 20 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
P. 20
de la Pointe-Lévis (a). Le second, d'une taille moyenne, aux
formes athlétiques, est au service du capitaine d'Haberville,
père de Jules: soldat pendant la guerre, il prend ses quar-
tiers chez lui pendant la paix. Il est du même âge que son
capitaine, et son frère de lait. C'est l'homme de confiance
de la famille: il a bercé Jules, il l'a souvent endormi dans ses
bras, en chantant les gais refrains de nos voyageurs des pays
hauts.
- Comment te portes-tu, mon cher José? Comment as-tu
laissé ma famille? dit Jules, en se jetant dans ses bras.
- Tou bin, 'ieu (Dieu) merci, fit José; ils vous mandent
bin des compliments, et ils ont grand hâte de vous voir. Mais
comme vous avez profité depuis huit mois que je ne vous ai
vu 1ma trine (foD, 1 M. Jules, ça fait plaisir à voir.
José, quoique traité avec la bonté la plus familière par
toute la famille d'Haberville, ne manquait jamais aux égards
qu'il leur devait.
Une question n'attend pas l'autre; Jules s'informe des
domestiques, des voisins, du vieux chien, qu'étant en trente-
sixième, il avait nommé Niger, comme preuve de ses pro-
grès dans la langue latine. Il ne garde pas même rancune au
chat glouton qui, l'année précédente, avait croqué tout vif
un jeune rossignol privé dont il raffolait et qu'il se proposait
d'apporter au collège. Il est bien vrai que, dans un premier
mouvement de colère, il l'avait poursuivi avec un gourdin
sous les tables, sous les lits et même jusque sous le toit de
la maison, où le méchant animal s'était réfugié, comme dans
une forteresse inexpugnable. Mais il lui a pardonné ses for-
faits, et il s'informe de sa santé.
- Ah çà 1 dit Baron le traversier, qui prenait peu d'inté-
rêt à cette scène, ah çà ! dit-il d'un ton bourru, quand vous
aurez fini de vous lécher et de parler chien et matou, vous
plairait-il d'avancer? la marée n'attend personne.
(a) Ces lettres indiquent des notes renvoyées à la fin du volu-
me, et marquées de la même lettre au chapitre correspondant.
1. L'auteur met dans la bouche de José le langage des anciens
habitants de nos campagnes, sans néanmoins s'y astreindre tou-
jours.
li emploiera aussi, assez souvent, sans prendre la peine de les
souligner, les expressions usitées par le peuple de la campagne.
- 21-