Page 24 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
P. 24

a électrisé les tribunaux et les parlements anglais; ses sol-
                                     dats, braves entre les braves, ont conquis des royaumes; ses
                                     poètes, ses écrivains, charment toujours les loisirs des hom-
                                     mes de lettres de la Grande-Bretagne. Aucune part de gloire
                                     ne lui a été refusée. Pourquoi, alors, son dernier cri d'agonie
                                     gronde-t-il encore dans les champs, dans les vallées, dans les
                                     montagnes et jusque sur la terre de l'exil? On croirait que la
                                     terre d'Erin, arrosée de tant de larmes, ne produit que de
                                     l'absynthe, des ronces et des épines; et cependant ses prés
                                     sont toujours verts, et ses champs se couvrent d'abondantes
                                     moissons. Pourquoi ce mugissement précurseur de la tem-
                                     pête s'échappe-t-il sans cesse de la poitrine des généreux
                                     Irlandais? L'histoire répond à cette question.
                                       Un oncle d'Arché, qui avait aussi suivi l'étendard et la
                                     fortune du malheureux prince, parvint, après la journée désas-
                                     treuse de Culloden, à dérober sa tête à l'échafaud et, après
                                     mille périls, mille obstacles, réussit à se réfugier en France
                                     avec le jeune orphelin. Le vieux gentilhomme, proscrit et
                                     ruiné, avait beaucoup de peine à subvenir à ses propres
                                     besoins et à ceux de son neveu, lorsqu'un Jésuite, oncle
                                     maternel du jeune homme, le déchargea d'une partie de ce
                                     lourd fardeau. Arché, admis au collège des Jésuites à Qué-
                                     bec, en sortait, après avoir terminé son cours de mathéma-
                                     tiques, au moment où le lecteur fait sa connaissance.
                                       Archibald Cameron of Locheill, que la main pesante du
                                     malheur avait mûri avant le temps, ne sut d'abord, quand il
                                     entra au collège, quel jugement porter sur un enfant espiè-
                                     gle, turbulent, railleur impitoyable, qui semblait faire le déses-
                                     poir des maîtres et des élèves. Il est bien vrai que tout
                                     n'était pas profit à cet enfant: sur vingt férules et pensums
                                     que le régent distribuait dans la classe, Jules d'Haberville en
                                     empochait dix-neuf pour sa part.
                                       Il faut avouer aussi que les grands écoliers, souvent à
                                     bout de patience, lui donnaient plus que sa part de taloches;
                                     mais, bah 1 on aurait cru que tout cela n'était que douceur,
                                     tant le gamin était toujours prêt à recommencer ses espiègle-
                                     ries. Il faut bien dire aussi que, sans avoir positivement
                                     de la rancune, Jules n'oubliait jamais une injure; qu'il s'en
                                     vengeait toujours d'une manière ou d'une autre. Ses sar-
                                     casmes, ses pointes acérées, qui faisaient rougir l'épiderme,
                                     arrivaient toujours à propos soit à l'adresse des maîtres
                                                         -   25-
   19   20   21   22   23   24   25   26   27   28   29