Page 158 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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ministère sacré; et ce bedeau, par oubli ou ~égligen~e, en
                                  avait probablement été la cause. Cette processlOn de Jeunes
                                  enfants couronnés d'immortelles, signifie ceux qui sont morts
                                  sans avoir perdu la grâce de leur baptê~e. ~e~x qui por-
                                  taient des corbeilles de fleurs, des vases ou brulalent les par-
                                  fums les plus exquis, sont ceux que leurs mères, résignées
                                  aux décrets de la Providence, ont offerts à Dieu, sinon avec
                                  joie ce qui n'est pas naturel, du moins avec résignation,
                                  en 'pensant qu'ils échangeaient une terre de misère pour
                                  la céleste patrie, où, près du trône de leur créateur, ils chan-
                                  teront ses louanges pendant toute une éternité. Dans les
                                  petites coupes d'or et d'argent étaient les larmes que la
                                  nature, avare de ses droits, avait fait verser aux mères qui,
                                   tout en faisant un cruel sacrifice, s'étaient écriées comme le
                                   saint homme Job: «Mon Dieu, vous me l'avez donné; mon
                                   Dieu! vous me l'avez ôté: que votre saint nom soit béni! ,.
                                     La pauvre mère, toujours agenouillée, buvait avec ses
                                   larmes chacune des paroles qui tombaient des lèvres du saint
                                   vieillard. Comme Marthe s'écriant aux pieds du Christ:
                                   c Si vous eussiez été ici, Seigneur, mon frère ne serait pas
                                   c mort; mais, je sais que présentement même, Dieu vous
                                   c accordera tout ce que vous lui demanderez »; elle répétait
                                   dans sa foi ardente: -  Si vous eussiez été près de moi, mon
                                   père, ma petite fille ne serait pas morte, mais je sais que,
                                   présentement même, Dieu vous accordera tout ee que vous
                                   lui demanderez.
                                     Le bon religieux se recueillit un instant et pria Dieu de
                                   l'inspirer. C'était alors une sentence de vie ou de mort qu'il
                                   fallait prononcer sur cette mère qui paraissait inconsolable.
                                   Il fallait frapper un grand coup, un coup qui la ramenât à
                                   des sentiments plus raisonnables, ou qui brisât à jamais ce
                                   cœur prêt à éclater. Il prit les mains de la pauvre femme dans
                                   ses mains sèches et crispées par l'âge, les serra avec tendresse,
                                   et lui dit de sa voix la plus douce:
                                     -  Vous aimiez donc bien l'enfant que vous avez perdue?
                                     -  Si je l'aimais, mon père 1 oh! mon Dieu 1 quelle ques-
                                   tion 1
                                     Et comme une insensée, elle se roula en gémissant aux
                                   pieds du vieillard. Puis se relevant tout à coup, elle saisit le
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