Page 128 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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vous avez fait bien des victimes. Eh bien! n'est-ce pas,
                                  cher oncle? De grâce racontez-nous vos prouesses.
                                    _ Laid, laid, mon petit-fils, fit mon oncle Raoul en se
                                  rengorgeant, mais plaisant aux femmes.
                                     Jules allait continuer sur ce ton, mais, voyant les gros yeux
                                   que lui faisait sa sœur, tout en se mordant les lèvres pour
                                   s'empêcher de rire, il reprit le refrain du dernier couplet:
                                             Vous m'avez d'un si grand cœur
                                             Rendu service.
                                             - C'est pour moi beaucoup d'honneur,
                                             Adieu donc, cher cœur.
                                     Les jeunes gens continuaient à chanter en chœur, lors-
                                   qu'ils virent, en arrivant à une clairière, un feu dans le bois, à
                                   une petite distance du chemin.
                                     - C'est la sorcière du domaine, dit mon oncle Raoul.
                                     - J'ai toujours oublié de m'informer pourquoi on l'ap-
                                   pelle la sorcière du domaine, dit Arché.
                                     -  Parce qu'elle a établi son domicile de prédilection dans
                                   ce bois, autrefois le domaine d'HabervilIe, repartit mon oncle
                                   Raoul. Mon frère l'a échangé pour le domaine actuel, afin
                                   de se rapprocher de son moulin de Trois-Saumons.
                                     - Allons rendre visite à la pauvre Marie, dit Blanche;
                                   elle m'apportait, le printl:mps, dans mon enfance, les premiè-
                                   res fleurs de la forêt et les premières fraises de la saison.
                                     Mon oncle Raoul fit bien quelques objections, vu l'heure
                                   avancée; mais, comme il ne pouvait rien refuser à son aima-
                                   ble nièce, on attacha les chevaux à l'entrée d'un taillis, et on
                                   se rendit près de la sorcière.
                                     L'habitation de la pauvre Marie ne ressemblait en rien à
                                   celle de la sibylle de Cumes, ni à l'antre d'aucune sorcière
                                   ancienne ou moderne. C'était une cabane de pièces sur piè-
                                   ces, de poutres non équarries, tapissée en dedans de mousse
                                   de diverses couleurs, et dont le toit en forme de cône était
                                   recouvert d'écorce de bouleau et de branches d'épinette.
                                     Marie, assise à la porte de la cabane sur un arbre renversé,
                                   veillait à la cuisson d'une grillade qu'elle tenait dans une
                                   poêle à frire, au-dessus d'un feu entouré de pierres pour
                                   l'empêcher de s'étendre. Elle ne fit aucune attention aux
                                   visiteurs, mais continua, à son ordinaire, une conversation
                                   commencée avec un être invisible derrière elle, à qui elle
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