Page 124 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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et tous dans la force de l'âge. Les Tremblay sont bien; j'en
suis charmé: ce sont de braves gens. Il y a de la maladie chez
Bonneau: probablement la grand'mère, car elle est très âgée.
Un enfant mort chez Bélair; c'était, je crois, le seul qu'ils
eussent: c'était un jeune ménage.
Mon oncle Raoul continua ainsi pendant -quelque temps à
s'intéresser des nouvelles de ses amis des Eboulements, de
l'île aux Coudres et de la Petite-Rivière.
- Je comprends, dit de Locheill, sans pourtant en avoir
la clef, ce sont des signes convenus que se font les habitants
des deux rives du fleuve, pour se communiquer ce qui les
intéresse le plus.
- Oui, reprit mon oncle Raoul; et, si nous étions sur la
côte du nord, nous verrions des signaux semblables sur la
côte du sud. Si le feu une fois allumé, ou que l'on alimente,
brûle longtemps sans s'éteindre, c'est bonne nouvelle; s'il
brûle en amortissant, c'est signe de maladie; s'il s'éteint tout
à coup, c'est signe de mortalité. Autant de fois qu'il s'~teint
subitement, autant de personnes mortes. Pour un adulte, une
forte lumière; pour un enfant, une petite flamme. Les voies
de communication étant assez rares, même l'été, et entière-
ment interceptées pendant l'hiver, l'homme, toujours ingé-
nieux, y a suppléé par un moyen très simple.
Les mêmes signaux, continua mon oncle Raoul, sont con-
nus de tous les marins, qui s'en servent dans les naufrages
pour communiquer leur détresse. Pas plus tard que l'année
dernière, cinq de nos meilleurs chasseurs seraient morts de
faim sur la batture aux Loups-Marins sans cette connais-
sance. Vers le milieu de mars, il se fit un changement si
subit qu'on dut croire au printemps. En effet, les glaces
disparurent du fleuve, et les outardes, les oies sauvages, les
canards, firent en grand nombre leur apparition. Cinq de
nos chasseurs, bien munis de provisions (car le climat est
traître au Canada), partent donc pour la batture; mais les
outardes sont en si grande abondance qu'ils laissent leurs
vivres dans le canot, qu'ils amarrent avec assez de négligence
vis-à-vis de la cabane, pour courir prendre leurs stations dans
le chenal où ils doivent commencer par se percer avant le
reflux de la marée. On appelle, comme vous devez le savoir,
ae percer, creuser une fosse dans la vase, d'environ trois à
quatre pieds de profondeur, où le chasseur se blottit pour
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