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diens et, par conséquent, à  les diriger plus facilement. La carte devient
                           ainsi un instrument de pouvoir.

                                 Encore prbsents sur un certain nombre de cartes à petite échelle
                           du continent, les Amerindiens sont presque rotalement absents des car-
                           tes de la province dressees aprbs la Conquête. Ils ne sont pas pour autant
                           disparus. Comme le montrent les rapports de Burton et de Murray18 sur
                           les gouvernements de Trois-Riviéres et de Québec, on ne les a pas oubliés.
                           mais on les a  plutôt marginalisés. Le problème n'est  plus de les  (( Bva-
                           cuer 1)  du territoire, mais de les concentrer quelque part ou ils ne nuiront
                           pas au progrès et où on les aura bien en main. Ce n'est donc plus sur les
                           cartes 3 petite Bchelle qu'il faut les chercher, mais bien dans une carto-
                           graphie plus fine du  territoire. Incorporés aux  stratégies de ddveloppe-
                           ment, ils sont desormais cartographiables, recensés sur des territoires
                           clos qui feront l'objet de nombreuses tractations.
                                 Bouchette les  localise et représente les  missions et  les villages
                           amerindiens avec les mèmes symboles qu'il utilise pour les autres villa-
                           ges  (figure 55) et  territoires administratifs, en prenant soin de bien les
                           distinguer. Étaient-ils  déjb assimilés ? Cartographiquement, oui. D'ailleurs,
                           Bouchette ne piesente sur sa carte que les populations vivant à l'intérieur
                           de l'espace organisé, alors qu'il est évident que le plus grand nombre des
                           Amérindiens du Bas-Canada occupent des  régions comprises dans les
                           terres de la Couronne, en dehors de l'aire aménagee par les Européens.
                                 Au fil du quadrillage territorial auquel se livre l'administration colo-
                           niale anglaise dans sa  poussée expansionniste, on  transforme graduel-
                           lement le probléme de l'anéantissement d'un  peuple en le réduisant à
                           i'6tablissement de limites territoriales (missions). L'arpentage et I'occu-
                           pation des cantons autour de Saint-Régis obligent les Amerindiens con-
                           cernés A  entrer dans le jeu des négociations proprement occidentales, ou
                           le tracé d'une ligne devient essentiel 2 la survie d'un peuple. Sur le plan
                           culturel, on a peu a peu contraint les Amérindiens 3 transformer leur per-
                           ception de  l'espace et  du territoire. S'ils veulent continuer a  jouir  d'un
                           espace vital, 11s doivent s'adapter au concept de propriété des Blancs. Ce
                           transfert de prkoccupation est rév818 par les plans d'arpentage. La gran-
                           deur de l'échelle de ces pians montre bien l'importance négligeable que
                           la question amérindrenne revêt aux yeux de l'administration.




                                 18  Adam  SHORT^ et Arthur G DOUGHTY (1921). 4t  Rapport du colonel Bur~on au sujet de
                                    i'etai du gouvernement de Trois-Riviéres.  avril 1762 )b  (vol  1. p. dG531 ei ai Rappori
                                    du g6nkral Murray au suiel de I'btat du gouvernenienr de QuBbec. 5 juin 1762 )#  (vol.
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