Page 90 - monseigneur
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grand-père ne savait pas lire, mais si ma grand-mère se
                             trompait, il la faisait recommencer quand il trouvait que ça
                             n'avait pas de bon sens, ce qu'elle venait de lire. Ensuite, c'est
                             lui qui lui expliquait ce que ça voulait dire! Ma grand-mère
                             ne s'en faisait pas; ça lui était égal, je suppose.
                                 Dans cette chambre de mes grands-parents, il y avait une
                             ouverture dans le bas de la cheminée, remplie de vieilles
                             choses; entre autres, les bottes de noces de mon grand-père.
                              Des petites bottes françaises en cuir luisant. Elles ressem-
                             blaient aux bottes des danseurs russes. Nous n'étions pas
                             fouilleux. Je me rappelle les avoir vues une fois; les autres
                             enfants, peut-être pas. Moi, j'allais souvent dans cette cham-
                             bre voir ma grand-mère qui m'aimait bien et qui avait tou-
                             jours des « papparmanes »(pepperrnint) à me donner.
                                 Mon grand-père avait un frère que nous appelions
                             « mon oncle Lin », Il mesurait six pieds (l ,80 m) et demeurait
                             dans le rang du Bois de Maska. C'était Grand Lin Morvan!
                             J'étais allée là une fois avec mes grands-parents car j'étais la
                             préférée de ma grand-mère et je profitais de certains privi-
                             lèges! Un autre voyage que j'ai fait avec eux, c'est à Saint-
                             Aimé-sur-le-Richelieu, chez une parente de ma grand-mère.
                             Il y avait une vieille de 107 ans chez ces gens-là. Ça m'avait
                             beaucoup impressionnée, car elle était petite et ils la portaient
                             dans leurs bras. Elle avait comme de la mousse dans le fond
                             des yeux; j'avais peut-être cinq ans et j'en ai eu presque peur.
                                 J'ai aussi connu une nièce de mon grand-père, Mme
                             Labelle, gentille et serviable; ma mère l'aimait. Elle venait
                             passer, pendant l'été, huit jours de vacances avec son mari et
                             ses deux plus jeunes enfants, des garçons. Son mari, qui aimait
                             prendre un petit coup, allait au village s'acheter un flacon de
                             gin. Il le cachait dans le champ de patates 1 Mais c'était un
                             bon garçon.
                                 Un autre souvenir qui me revient à la mémoire. J'étais
                             alors bien jeune. Nous étions à Yamaska, un dimanche, et


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