Page 92 - monseigneur
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de vieux qui parlaient des Patriotes de 37 (mon grand-père
                              était né en 1830), de Papineau, de Chénier, des batailles de
                              Saint-Denis, Saint-Charles, Saint-Eustache où nous pou-
                              vions voir les ravages des boulets de canon dans les murs de
                              j'église... Puis aussi de l'apostat Chiniquy, qui a fait beaucoup
                              de bruit; chacun donnait son opinion, car c'était un grand
                              prédicateur, paraît-il. Nous entendions aussi raconter les
                              exploits de Louis Cyr, l'homme fort. Une autre rengaine que
                              nous débitions tout d'un bout, nous, les enfants: «John Sulli-
                              van, Corbett et Fitziman!» Des hommes forts aussi, je
                              suppose. C'est quand nous avons commencé à apprendre
                              l'histoire du Canada que ces choses nous sont revenues à la
                              mémoire.
                                 Ces souvenirs relatés, je reviens à la petite école. Chez
                              les grands, la maîtresse s'appelait Zélica Pinard. Pas de diplô-
                              me non plus, mais elle avait de l'autorité et du bon sens. Elle
                              enseignait bien. Les deux institutrices étaient des fiUes du
                              rang. Après ces deux maîtresses, nous avons eu des diplô-
                              mées, des filles de Pierreville, une Mlle Lafrenière, la fille du
                              traversier en haut du village, et une Mlle Berthe Charland.
                              Ces maîtresses se retiraient chez nous dans la semaine. Elles
                              retournaient chez elles le vendredi soir. Je reviendrai à l'école
                              plus tard.
                                 Je vais maintenant parler de nos activités: aller aux pom-
                              mettes, aller aux fraises des champs quand c'était le temps,
                              ensuite aux framboises et aux bleuets. Il y avait beaucoup de
                              ces fruits le long des clôtures, au bord du bois et le long des
                              fossés. En passant par-dessus les clôtures de pieux, nous nous
                              rendions à travers les terres, jusqu'au Bois de Maska
                              (Yamaska). Nous revenions avec nos chaudières de 5 ou 10
                              livres (2,2 et 4,5 kg), pleines de fruits. Nous nous régalions
                              de bonnes trempettes (pain, Lait, fruits et sucre); c'était déli-
                              cieux! Ma mère faisait des tartes et aussi des confitures.
                              Tout le monde était satisfait.


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