Page 43 - monseigneur
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pressionnant, une maison en feu dans la nuit! De nos fenêtres,
                                 nous avons vu un spectacle pas ordinaire! C'est là que, plus
                                tard, la Commission scolaire a bâti une nouvelle maison
                                d'école. L'ancienne a été vendue aux Lagotte, nos voisins.
                                    Là, nous continuons le rang avec les Morvan. Ce nom-là
                                portait en lui-même son surnom; au printemps, dans le temps
                                des rhumes, tous les enfants étaient plus ou moins morveux!
                                Les Lagotte, qui étaient nos voisins côté ouest, sont restés nos
                                voisins, mais à l'est, en allant au village. Cette Mme Lagotte
                                était souvent chez nous. Son mari était journalier et travaillait
                                un peu partout. Ils avaient un emplacement à même la terre de
                                notre voisin, une maison au bord du chemin et un jardin en
                                arrière qui finissait à nos bâtiments. Cette voisine n'avait donc
                                 pas trop d'ouvrage et venait à tout moment faire son tour avec
                                 les plus jeunes de ses enfants. Ceux-ci étaient chez eux, chez
                                nous. Le plus jeune, qui s'appelait Rosario mais que nous
                                 appelions Dédais, faisait une crise à sa mère, en se roulant par
                                terre, quand il voulait une beurrée (tartine) su (chez) Morvan.
                                Cette voisine s'appelait Élisabeth, et ma mère, Marie. Elle
                                disait: «Ne vous dérangez pas, Marie, je vas lui faire une
                                 beurrée. » Elle connaissait notre maison autant que la sienne!
                                 Quand il nous venait de la visite (assez souvent), elle arrivait
                                 aussitôt, car elle connaissait toute notre parenté. C'était une
                                 bonne personne, très serviable. Si ma mère avait besoin
                                d'aide, elle s'offrait aussitôt. Elle était très habile pour travail-
                                 ler le cuir et c'est elle qui faisait nos souliers de «beu »
                                 (boeuf), les bottes des hommes et aussi les pelotes (balles).
                                 Mon père faisait tanner des peaux de vaches et de veaux chez
                                 le tanneur du village, M. Matte, et c'est notre voisine qui tra-
                                 vaillait nos souliers sans hausses et d'autres avec hausses et
                                 lacés (bottines). Pour les pelotes, nous les faisions en corde et
                                 elle les entourait de cuir. C'était très bien fait et très solide.
                                 Nous appelions aussi cette voisine La Presse, car, avant que
                                 ses enfants se lèvent le matin, elle allait faire son petit tour un


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