Page 38 - monseigneur
P. 38
Près de la maison, entre le puits et le hangar, il y avait en
permanence un baquet de bois rempli d'eau pour le lavage des
pieds des enfants, le soir. Car nous allions nu-pieds en été et
plusieurs fois de bonne heure Je printemps. De la boue et du
fumier, nous connaissions ça, puisque le tour de la maison, les
bâtiments, le jardin et le chemin étaient nos champs d'action.
Le dimanche, nous avions des bottines lacées ou à boutons,
suivant la mode. Ce n'était pas toujours à notre pied, car les
jeunes héritaient des chaussures des plus vieux, si elles étaient
encore bonnes! Ceux qui revenaient de la messe à pied se dé-
chaussaient et attachaient les lacets de leurs bottines ensemble
pour les suspendre sur leurs épaules, et allons donc! dans le
sable du chemin ou dans la boue s'il avait plu. Nous nous
essuyions les pieds sur l'herbe avant d'entrer dans la maison.
Mes grands-parents avaient chacun une paire de sabots qu'ils
laissaient sur le perron. Quand ds sortaient, ils enfilaient leurs
sabots et les laissaient toujours sur le perron en rentrant. Il y a
une façon de porter ces sabots; nous essayions ça, nous, les
enfants, mais nous n'allions pas loin sans les perdre.
Ma mère cirait les chaussures le samedi soir et elle minait
(polissait avec de la mine à plomb) le poêle aussi toutes les
semaines. Ces gros poêles de fonte devaient être minés de
temps à autre, pour ne pas rouiller. Quand ils étaient bien
minés, ils étincelaient comme un müoir. Malgré tout cet ou-
vrage, ma mère était en bonne santé. Le travail ne lui faisait
pas peur, heureusement!
43