Page 42 - monseigneur
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femmes» ! Ce qui voulait dire ce que les hommes pensaient
                              des femmes!
                                  Les anciens devaient être tous un peu parents car il y avait
                              beaucoup de familles du même nom; c'est pourquoi il y avait
                              tant de surnoms qui rappelaient les ancêtres. Aussi, dans le
                              rang, nous appelions toutes les personnes âgées «bonshom-
                              mes» ou «bonnes femmes ». Souvent, nous ne prenions pas le
                              temps de dire «bonhomme », c'était tous des «boms »: bom
                              Francette, bom Désailly, bom Jacques, bom Pierre Charlie,
                              etc. Il y avait aussi beaucoup de « Pitou » pour les garçons:
                              Pitou Noé, Pitou Dagnel (Daniel), Pitou Udger, etc., à part
                              les quelques chiens qui s'appelaient Pitou !

                                  L'oncle de mon mari s'appelait Napoléon Bibeau (Polion
                              Jaquette). Il avait un frère, Daniel Jaquette, aussi pêcheur et
                              chasseur. On comptait d'autres Bibeau, des Chapdelaine (dits
                              Charlie). Eux avaient un fils sourd-muet. Ils l'ont envoyé à
                              Montréal, faire son cours à l'Institut des Sourds-Muets. Un
                              bel homme, toujours souriant et qui avait de belles dents. Un
                              jour, il est venu voir ses parents. Il était marié avec une
                              sourde-muette, très jolie aussi. Ils avaient des enfants nor-
                              maux et beaux. En face de chez eux, ils avaient fait une niche
                              entourée d'une petite clôture et qui contenait une statue de
                              saint Joseph. Nous y allions faire le mois de Marie (mai) tous
                              les ans. Le chapelet, la prière du soir, un cantique et nous reve-
                              nions en causant chacun avec son ami(e) ou un groupe, pour
                              finir la veillée où nous étions invités.
                                  De l'autre côté du chemin, c'était un autre Chapdelaine,
                              Philibert. Nous l'appelions Coq Philibert; il était grand et
                              fier. Il jouait très bien du violon; l'oncle Napoléon aussi.
                              C'était de vrais musiciens-nés. Avant d'arriver chez nous, en
                              allant vers le village, le terrain descendait un peu. En haut de
                              cette côte, quand j'étais petite, il y avait une vieille maison qui
                              n'était plus habitée. Une nuit, elle a passé au feu. C'est im-


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