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NOTRE COMMUNAUTÉ, NOS INSTITUTIONS
De plus, ces changements illustrent aussi
les nouvelles réalités d’une ville en pleine
croissance. Plusieurs des grands propriétaires
terriens fondateurs étaient des Canadiens
de langue anglaise et quand ils ouvraient
des rues pour desservir leurs propriétés,
ils leur donnaient naturellement des noms
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anglais . Mais comme ces quartiers comptaient
maintenant une population majoritairement
francophone, le maire croyait que c’était
tout aussi naturel de changer vers un nom
plus représentatif de leur composition
démographique. Dans tout ce processus de
changement, les résidents anglophones de la
ville ont aussi été respectés et leurs quartiers Des policiers devant l’hôtel de ville de Vanier au début des années 1970. Photo :
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ont gardé leurs noms de rues anglais . Vingt ans Muséoparc Vanier, SL-s_labelle_17.
plus tard, la ville d’Eastview allait connaître un
autre changement de nom qui lui donnerait son sa spécificité bilingue aux yeux de la province et de
aspect francophone définitif. tout le pays.
Enfin un nom français D’autres évènements parallèles expliquent ce désir de
En 1963, la ville d’Eastview obtient son statut de cité changement. Depuis les années 1960, la ville était au
et devient alors la plus petite des 32 cités ontariennes cœur d’un immense projet de réorganisation interne
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ainsi que la deuxième, après Cornwall, avec la plus des secteurs résidentiels, commerciaux et industriels .
grande concentration de francophones, soit 65 % . En plus de ces modifications, la province ontarienne
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C’est dans ce contexte qu’entre dans l’arène politique commençait alors son nouveau programme de
le fils aîné de Donat Grandmaître, Gérard qui sera restructuration municipale, qui consistait à regrouper
maire de 1965 à 1970 et de 1972 à 1975 . des petites municipalités pour les aider dans leur essor
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urbain. Bref, Eastview était sur le point de se joindre
Plusieurs évènements se produiront pour créer les au nouveau regroupement régional de la région
conditions parfaites en vue d’un changement de nom d’Ottawa-Carleton . Ces évènements ont aussi poussé
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pour la cité d’Eastview. L’idée germe dans la tête le maire Grandmaître à vouloir un nouveau nom plus
du maire pendant les célébrations du centenaire du francophone pour s’assurer que l’identité de la cité soit
Canada. En présentant sa ville aux dignitaires, le maire préservée au sein d’un regroupement municipal.
Grandmaître déplore que le nom d’Eastview ne soit
pas très représentatif de sa population francophone. Finalement, en étudiant la petite histoire de Vanier,
La Société Saint-Jean-Baptiste appuiera cette idée en il est possible d’affirmer que l’identification des
présentant officiellement une proposition au conseil citoyens à leur ville a été grandement encouragée
municipal la même année . Cette fois-ci, il y a peu par le changement des noms, tant des rues que de
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d’opposition. Il faut dire que le nom de Vanier, choisi la ville même. En 1948, le maire Donat Grandmaître
en l’honneur du gouverneur général du Canada, parvient à faire changer 54 noms de rues et en 1969,
Georges Vanier, plaît aux francophones tout autant son fils, Gérard Grandmaître, à son tour maire, finit
qu’aux anglophones. En plus d’être le premier par changer le nom de la ville d’Eastview à Vanier.
gouverneur général francophone, Vanier était très On oublie souvent que les noms des rues et des villes
actif dans la communauté d’Eastview; en plus, il a qui nous entourent illustrent notre histoire et notre
su s’attirer le respect et l’admiration des Canadiens patrimoine. Et pour moi, personnellement, je suis fière
anglais. Le nouveau nom de Vanier permettra à la de mon arrière-grand-père Donat et de mon grand-
jeune cité d’assumer son identité réelle, à reconnaître père Gérard pour leur contribution importante à
l’histoire de ma ville et à ma fierté franco-ontarienne.
7 Bourassa et collab., op. cit.
8 Archives de la Ville d’Ottawa, op. cit.
9 Laporte, op. cit.
10 Ibid. 12 Laporte, op. cit.
11 Archives de la Ville d’Ottawa, op. cit. 13 Ibid.
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