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SECTION SPÉCIALE – PANDÉMIE
maladies, telles la variole, la fièvre typhoïde,
la « consomption » (tuberculose) et la
coqueluche.
Un taux de mortalité élevé au XIX siècle
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Les grandes épidémies ont constitué une
effroyable force meurtrière à Bytown/Ottawa
au XIX siècle. Mentionnons d’abord les
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7 000 ouvriers travaillant à la construction du
canal Rideau décimés par la fièvre des marais,
entre 1828 et 1830. Comme la fièvre jaune
qui affecte les populations de l’Afrique et de
l’Amérique du Sud, la fièvre des marais est
aussi transmise par un moustique, mais elle
s’apparente plutôt à un type de malaria qu’à
un virus.
Le vieux cimetière du domaine Billings, l’un des plus anciens d’Ottawa, datant de la
première moitié du 19 siècle. Photo : Samy Khalid, 2020.
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Puis, l’épidémie de choléra asiatique fait son
apparition. Le petit hôpital de Barrack Hill ne La fièvre typhoïde (contractée par de l’eau ou des
suffit plus et les autorités construisent à la hâte un aliments contaminés par la bactérie), la variole, la
hôpital d’isolement sur la rue Sussex, afin de soigner scarlatine ainsi que les grippes saisonnières (influenza)
les patients et de contrôler l’épidémie qui sévit de continueront de faire des ravages dans la seconde
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1832 à 1834. Cette maladie tue la moitié des personnes moitié du XIX siècle et au début du XX siècle.
atteintes. Plusieurs épidémies de choléra s’ensuivent Pendant plusieurs décennies, la capitale sera aux
jusqu’en 1854. prises avec des épidémies récurrentes de typhoïde,
notamment en 1875, en 1886 et en 1887. Près d’un
Ensuite, l’épidémie de typhus de l’été 1847 a été millier de cas ont été signalés à l’hiver 1911 et près
particulièrement dévastatrice. Malgré les efforts d’une centaine de personnes ont péri. L’été suivant,
déployés par les organisations religieuses et de une autre épidémie survient. Près de 1 380 personnes
bienfaisance, notamment les Sœurs de la Charité contractent la fièvre et 91 en meurent.
sous la direction d’Élisabeth Bruyère, de nombreux
nouveaux immigrants irlandais fuyant la grande De la fin septembre 1918 au début de l’année 1919, la
famine en sont les principales victimes. Des membres grippe espagnole frappe à son tour. La classe moyenne
du personnel hospitalier succombent également inférieure d’Ottawa, surtout des Irlandais et des
à la maladie. Bytown comptait alors environ Canadiens français, est durement touchée. On estime
7 000 habitants, dont plusieurs centaines étaient que 10 % de la population est atteinte et qu’environ
atteints du typhus et près de 310 en sont décédés. 520 personnes en sont décédées. Parmi les victimes, on
compte un joueur de l’équipe de hockey des Sénateurs,
Cimetière de la Côte-de-Sable (1845-1872) l’épouse d’un sénateur et quelques médecins. On
soupçonne que Jules Lemieux, un fonctionnaire
À mesure que Bytown et sa population ont pris de 71 ans au ministère des Travaux publics, est la
de l’ampleur, le cimetière de Barrack Hill s’est première victime. Deux vagues subséquentes moins
vite retrouvé au cœur de la ville. Les résidents se mortelles sévissent aux printemps 1919 et 1920.
plaignaient de « vapeurs flottantes » provenant de
l’endroit et du piètre état des lieux. Par conséquent, Il n’y a aucun doute que les restes de plusieurs
on a élaboré des plans pour ré-inhumer les restes victimes des diverses pandémies enterrées à
humains dans le nouveau cimetière de la Côte-de- Barrack Hill dans les années 1830 ont été déplacés
Sable (1845-1872), aujourd’hui connu comme le parc au cimetière de la Côte-de-Sable et que, par la suite,
municipal de Macdonald Gardens, situé au nord de la un bon nombre de ces dépouilles ont été exhumées
rue Rideau, entre Wurtemburg et Cobourg, non loin de puis ré-inhumées dans les cimetières Notre-Dame et
la rivière Rideau. Beechwood.
16 LE CHAÎNON, ÉTÉ 2020