Page 86 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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SOUS LA DOMINATION FRANÇAISE 71
à envoyer beaucoup de monde en la Nouvelle-France, principalement
des soldats dont on pourrà faire, en très peu de temps de bons habitants.
On ne doit rien épargner pour mettre ces colonies en force, puisqu'on
peut et on doit les considérer comme le boulevard de l'Amérique contre
les entreprIses des Anglais, qu'on ne peut les abandonner à leurs seules
ressources actuelles sans les livrer, en quelque sorte, aux Anglais, à qui
la supériorité en Amérique et les richesses qu'ils en retireraient à l'exclu-
sion des autres nations leur donneraient, très certainement, la supériorité
en Europe" (1).
Cet avertissement a quelque chose de solennel; il sonne comme le .
glas funèbre de la Nouvelle-France; il resta sans écho auprès de Louis
XV et de ses ministres.
Les successeurs de la Galissonnière, Jonquière et Duquesne assistè-
rent impuissants à l'assassinat de Jumonville et à la dispersion des Aca-
diens (1755),et Vaudreuil, le premier canadien appelé à la haute fonction
de gouverneur de la colonie, en sera le dernier titulaire.
L'immigration et le peuplement
L'appoint fourni à la population du Canada par l'immigration
française durant ces quarante années (1714-1754) consiste, nous
venons de le dire, dans l'envoi de quelques engagés, d'un plus grand nom-
bre de prisonniers, dans l'établissement des soldats expédiés comme
recrues.
Pour les engagés, on remet en vigueur les anciennes ordonnances (2).
Par un règlement du 16 novembre 1716, le roi décréta que les émigrés
qui savaient les métiers de maçon, tailleur de pierre, forgeron, serrurier,
menuisier, tonnelier, charpentier, calfat et autres métiers utiles dans les
colonies seraient comptés aux armateurs pour deux engagés.
Comme par le passé, ces engagés devaient faire un stage de trois ans
chez un habitant avant de recouvrer leur liberté. On ne tarda pas à
découvrir que des fraudes se commettaient. Des armateurs présentaient
au bureau des classes du port de leur embarquement des particuliers
qu'ils faisaient passer pour engagés quoiqu'ils ne le fussent pas, et qu'ils
renvoyaient après les avoir fait passer en revue. Pour expliquer: l'absence
de ces engagés, ils se contentaient de rapporter des certificats de déser-
tion.
Pour remédier à cet abus, le roi rendit une nouvelle ordonnance (3)
en vertu de laquelle les capitaines et propriétaires de vaisseaux assujettis
à porter des engagés aux colonies, seraient tenus de payer entre les
mains du trésorier général de la marine en exercice, un mois après l'arri-
vée de leurs vaisseaux, dans le port de débarquement, la somme de
soixante livres pour chaque engagé qu'ils n'auraient pas remis dans les
dites colonies et dont ils ne rapporteraient pas un certificat. Pour les
~ngagés de métier, la somme à payer était de cent-vingt livres, et de plus,
(l)-Mémoire sur les colonies de Franc& dans l'Amérique du Nord
(2)-Voir Chap. III p. 32.
(3)-Edits et Ordo Vol. l, pp. 485-486.