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40             LA COLONISATION DANS QUEBEC

             voyage, qui durait parfois une année, ils recevaient pour tout salaire la
             moitié des fourrures qu'ils avaient amassées" (1).
                 Le nombre des coureurs des bois augmenta rapidement.       Duches-
             neau le porte à 800 en 1680   (2).  On comprend tous les désordres qui
             résultaient d'un pareil état de chose.
                 Les familles se dégarnissaient d'enfants, les travaux de l'agriculture
             étaient désertés; les coureurs des bois interceptaient les canots des
             Indiens, les empêchaient de se rendre aux marchés naturels, et trafi-
             quaient l'eau-de-vie pour la fourrure (3).
                 Des fonctionnaires importants, .le gouverneur lui-même (4) sont
             accusés par Duchesneau d'encourager les coureurs des bois; l'établisse-
             ment du fort de Cataracoui, en 1673, élevé dans le but évident d'étendre
             le commerce des fourrures, (5) la retentissante querelle de Frontenac
             avec Perrot, gouverneur de Montréal, à propos de ce poste, semblent
             donner raison à Duchesneau contre Frontenac qui, dans de longues
             lettres à Colbert, proteste de son innocence (18).  C'est avec l'assenti-
             ment de Frontenac que La Salle, devenu propriétaire de Cataracoui,
             s'enfonce dans l'intérieur des terres, construit successivement les forts
             de Niagara, de Miamis, de Crevecœur, de St-Louis et de Prudhomme.
             Pendant ce temps, Duluth associé lui aussi de Frontenac, bâtit le fort
             Kaministiquia (1678), celui de la Tourette (1683), sur le lac Nipigon
             et le fort St-Joseph, à l'entrée du lac Huron, dans la rivière Ste-Claire.
             "Ces forts, dit Gerin, qui permettaient d'accumuler à de grandes distances,
             les approvisionnements, les munitions, les marchandises et les pellete-
             ries, reculèrent indéfiniment les limites possibles de la course des bois"
             (6) .

                 (l-Gérin, M.S.R.C., 1896.  Sec. 1ère, p. 83.
                 (2)-Il Y a 800 personnes au plus dans les bois, quelque chose qu'en vous mande au contraire
            et je n'en ai pu savoir le nombre au juste parce que tous ceux qui sont intéressés avec eux les cachent
            (Mémoire de Duchesneau à Colbert, 13 nov. 1680.)  A.C.C.G .. Vol. 5. fol. 161.
                 (3)-Souvenez-vous, s'il vous pla1t, Monseigneur, écrit Duchesneau, que l'année devant celle de
            mon arrivée en ce pays, on s'était plaint que la grande quantité de monde qui allait traiter des pelleteries
            dans les habitations des sauvages ruinaient la colonie parce que ceux qui pouvaient seuls la faire valoir
            étant jeunes et ayant la force de travailler,abandonnaient leurs femmes et leurs enfants, la culture des
            terres et le soin d'élever des bestiaux; qu'ils se débauchaient, que leur éloignement donnait lieu au
            libertinage de leurs femmes. comme il est arrivé fort souvent, comme il arrive encore tous les jours,
            qu'ils s'accoutumaient à une vie fainéante et vagabonde, qu'ils ne pouvaient plus quitter; qu'ils profi-
             taient peu de leurs peines parce qu'on leur faisait même consommer en ivrognerie et en beaux habits le
            peu qu'ils gagnaient qui étaient bien modiques, ceux qui leur donnaient les congés en ayant la meilleure
            part,outre le prix des marchandises qu'ils leur vendaient bien cher et que les sauvages n'apporteraient
            plus leurs pelleteries en si grande abondance pour traiter aVec les bons habitants. si un grand nombre de
            jeunes gens les allaient enlever jusque chez les barbares qui nouS méprisaient par la grande avidité que
            DOus en témoignions avoir.  Duchesneau à Colbert. la nov. 1679.  A.C.C.G., Vol. 5, fol. 32.
                 (4)-Sur toute l'affaire des coureurs des bois et sur la protection que j'ai écrit les années dernières
            que M. de Frontenac leur donnait en même,temps de l'intérêt qu'il avait avec eux, je n'ai pu me dispen-
            ser de le faire, puisque ce que j'ai mandé sur ce sujet n'a pas été avancé avec inconsidérations et que j'en
            ai envoyée les pièces justificatives et que ce qu'a fait encore cette année M. le gouverneneur,et que je
            vous expliquerai dans la suite vous convaincra que l'affaire des COUreurs des bois était la sienne.  (Du-
            chesneau au marquis de Seignelay, 13 nov. 1681.)  A.C.C.G .. Vol. 5, fol. 230.
                 (5)-Le fort de Cataracoui a été établi en l'année 1673 par M.le comte de Frontenac en appa-
            rance pour la sureté du pays, mais en effet pour faire la traite avec les Iroquois, pour servir de refuge
            et d'entrepôt aux coureurs de bois répandus dans toutes les nations Outaouaises et pour lier un com-
            merce de castors avec les Hollandais et les Anglais. d'Orange et de Manatte.  Mémoire adressé à
             Messieurs les Intéressés en la Société en commandite de la Ferme et commerce du Canada. Arch.
            Provo Man. N.-France, 2ème série, Vol. II.
                 (ti)-M.S.R.C., 1896.  Sect. II, p. 86.
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