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SOUS LA DOMINATION FRANÇAISE                          39

          Il charge Frontenac de contrôler le recensement que prépare le
     nouvel intendant Duchesneau et lui recommande d'avoir pour maxime
     qu'il "vaut mieux occuper moins de pays et le mieux peupler que de
     s'étendre davantage et avoir des colonies faibles qui peuvent être faci-
     lement détruites par toutes sortes d'accident".
          Nouvelle surprise duroi, lorsqu'il constate que le recensement de 1676
     n'indiqu~ que 8, 415 âmes, "il faut bien y croire", ajoute-t-il (1).
     En 1681, il Y a 9,677 âmes dans la colonie et 10,251 en 1683, 10,725 en
     1685 (2).   Ainsi en douze ans, de 1673 à 1685, la Nouvelle-France a
     gagné à peine 4,000 âmes (3).       Louis XIV a raison d'être surpris;
     l'état de la population ne répond pas au chiffre de l'accroissement
     naturel.  Il y a déperdition quelque part.   Cette déperdition est causée
     par le recrutement des coureurs des bois pour le commerce des
     fourrures.
                             Les coureurs des bois.


          La traite des fourrures avec les Indiens avait toujours été la grande
     pourvoyeuse de la colonie. Dans les commencements, elle se faisait dans les
     villes de Montréal,de Trois-Rivières et de Québec,où les traitants allaient
     rencontrer les sauvages, la crainte de l'Iroquois les empêchant de s'éloi-
     gner des habitations.   Mais une fois la hache de guerre enterrée, la
     course des bois s'organisa et les colons amateurs d'aventures entreprirent
     d'aller à la rencontre des naturels dans les bois, sur les rivières et même
     les relancèrent jusque dans leurs lointaines bourgades (4). Leschefsde
     ces coureurs des bois furent un certainnombre de gentilshommes,parmi les-
     quels six ou sept officiers du régiment de Carignan; pauvres et besogneux,
     hors d'état de tirer de leurs seigneuries un revenu appréciable, "ces
     gentilshommes résolurent de s'emparer du commerce des fourrures et d'y
     associer les fils des habitants que la nécessité contraignait à rechercher
     ailleurs que sur leurs terres à peine ouvertes un supplément de ressources
     (5).  Le mode d'engagement le plus ordinaire parait avoir été celui-ci:
     le gentilhomme ou le marchand fournissait la cargaison, les marchandises
     destinées aux sauvages; les coureurs des bois de leur côté, équipaient
     leurs canots, pourvoyaient à leur propre entretien le long de la route,
     supportaient toutes les fatigues de L'expédition, et au retour de leur

          (l)-A. C. rég. des dép. Vol. 7,1677, fo. 1.
          (2)-Recensement du Canada, 1870-1871, Vol. IV, pp. 11, 14.
          (3)-Ell 1673, 6, 705 en 1685, 10,735.
          (4)-Gérin, M.S.R.C. 1896.  Sect. 1ère, p. 86.
          (5)-Plusieurs des gentilshommes, officiers réformés et des seigneurs des terres,comme ils s'ac-
     coutument b. co qu'on appelle en France la vie de gentilhomme de campagne, qu'ils ont pratiquée eux-
     mêmes ou qu'ils ont vu pratiquer, font de la chasse et de la pêche leur plus grande occupation et parce
     que dans leurs vivres et pour leur habillement et celui de leurs femmes et de leurs enfants. ils ne peuvent
     se passer de si peu de choses que les simples habitants, et qu'ils ne s'appliquent pas entièrement au
     ménage b. faire valoir leur terres, ils se mêlent de commerce, s'endettent de tous côtés, excitent leurs
     jeunes habitants b. courir les bois et y envoient leurs enfants afin de traiter de pelleteries dans les
     habitations sauvages ct dans b profondeur des bois au préjudice des défenses de Sa Majesté et avec
     tout cela, ils BOnt dans une grande misère.  (Duchesneau b. Colbert, 10 nov. 1679).  A.C.C.G., Vol. 5,
     fol. 32.
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