Page 48 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
P. 48
SOUS LA DOMINATION FRANÇAISE 33
colons, forment un appoint considérable dans cette immigration.
Nous pouvons suivre année par année dans les lettres de la Mère de
l'Incarnation, le Journal des Jésuites, la correspondance du gouverneur
et de l'intendant, l'arr vée à Québec de ces jeunes filles. Il en vint
100 en 1665, 92 en 1667, un grand nombre en 1668, 150 en 1669, 150
en 1670, 150 en 1671, 30 en 1672, 60 en 1673. Ces fiHes furent d'abord
choisies dans les orphelinats de Paris, mais en 1670 Talon, ayant fait
remarquer à Colbert que celles tirées de l'Hôp tal de Paris n'étaient
pas assez robustes pour résister au climat et aux durs travaux de la
culture, celui-ci écrivit à l'archevêque de Rouen, lui demandant d'en
gager ses prêtres à trouver environ 60 villageoises qui consentiraient
à passer en Canada pour s'y marier (1). Ces recrues féminines étaient
envoyées autant que possible sous la surveillance et la direction de
personnes dignes de confiance. Madame Bourdon, femme de l'ancien
procureur général se dévoua à cette œuvre.
A peine débarquées à Québec ou à Montréal, ces filles trouvaient
aussitôt à s'établir. Le roi, en 1671, note qu'il a appris avec plaisir que des
165 filles passées au Canada l'année précédente, il n'en reste que quinze
à marier (2). Pour encourager les mariages il accordait une dot de
50 livres à chaque nouvelle mariée. L'historien Ferland (3), Benjamin
Sulte(4),M.EdmondRoy (5), ont refuté dansdespagesmagistralesles
histoires scabreuses que le baron de Lahontan a imaginées sur le compte
de ces filles. "A l'aide des archives des paroisses de Québec et de Mont-
réal et des greffes des notaires, on peut retracer l'origine, la généalogie,
l'état de fortune de chacune de ces émigrées ... Nos origines sont si
pures et si bien dégagées de toute scorie que nous ne craignons pas
d'indiquer les sources où il est possible de les saisir sur le vif et dans toute
leur intimité. Ce qui nous a surtout étonné en parcourant ces dossiers
poudreux c'était de voir quel degré d'instruction possédaient ces
filles, quel empressement les plus haut dignitaires mettaient à assister
à leurs unions et à apposer leur signature à leur contrat de mariage, de
quels soins on les entourait, avec quelle délicatesse on cherchait à leur
éviter les ennuis d'un voyage aussi long que celui de France en Canada.
Le gouvernement français traitait vraiment d'une façon bien extraor-
dinaire ces pauvres filles perdues de mœurs et de réputation" (6).
Enfin cette immigration se composait de familles entières qui
venaient prendre des terres spontanément, le plus souvent sur la
demande ou sous la conduite des seigneurs, soit laïques, soit ecclésias-
tiques (7).
Il faut ajouter à ces recrues expédiées au compte du roi les soldats qui
(I)-Le ministre à l'archevêque de Rouen, 27 février 1670; A. C. reg. des dép. Vol. 2, fol. 15~.
(2)-Lettre à Talon, A. C. reg. des dép. Vol. 3, fol. 2272.
(8)-Notes sur les régistres de N.-D. de Québec, pp. 38 et 39.
(4)-Prétendues origines des Canada.-Français, M.S.R.C., 1ère sec. 1885, pp. 18-19.
(5)-Le baron de La Hontan. M.S.R.C. Sect. 1ère, 1894, pp. 155-158.
(6)-Edm. Roy, loc. cit. p. 157.
(7)-Mémoire au Ministre du sieur Patoulet, agissant au lieu et place do M. Talon, absent, sur
l'état du Canada. A.C.C.G. Vol. 3. fol. 61.
3