Page 91 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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-Comment   es-tu  monté ?  demanda  la  mère.
                                       -En  camion,  avec Pierre  à Baptiste.
                                        Ce  soir-là,  Marie  et  Louis-Philippe  avaient  bien  des  choses  à
                                   se dire.  Ils parlèrent  de la  nouvelle  conception  de l'autorité,  de la
                                   dégradation  des  mœurs,  du  rêve  des  jeunes  pour  une  anti-société.
                                   Ils se sentaient  des rescapés d'un autre âge.



                                        Tres  tôt,  le  matin  du  9  décembre,  un  étrange  wrtege  passait
                                   dans  les  rangs  de  Teme,.Haute.  Un  tracteur  de  ferme  tirant  une
                                   longue  boite  faite  d'un  bois  rugueux  posée  sur  un  traîneau  plat
                                   s'approchait  des maisons et  se perdait  derrière les  bâtiments.  Après
                                   quelques minutes,  il  reprenait  le  chemin  et  une  automobile  ou  une
                                   cam,ionnette s'ajoutait  au défilé.  La tournée  terminée, il s'était  arrê-
                                   té chez  Louis-Philippe  Landry.  Dans  cette  boîte  mystérieuse,  il  y
                                   avait  un  lourd  va-et-vient,  des  pressions  puissantes  qui  faisaient
                                   craquer  les  parois,  et  uri  concert  inharmonieux  de cris  et  de  gro-
                                   gnements.
                                        Au  cours  de  la  dernière  réunion,  tenue  cette  fois  chez  Alexis
                                   Boudreau,  on  avait  beaucoup  parlé  de l'entretien  des  chemins  d'hi-
                                   ver ; plusieurs  craignaient  que  la  Voirie  ne  vienne  à  discontinuer
                                   l'envoi  de  chasse-neige  dans les  rangs  de  Terre-Haute.  Il  fut  aussi
                                   question  de travaux d'équipe  à  effectuer  avant  Noël.  Eugène  Soucy
                                   avait  rappelé  une  ancienne  coutume  du  temps  des avents :  la bou-
                                   cherie.  La croyance  populaire  prétendait  que  s'il  faisait  froid  le  8
                                   décembre,  cette  tempéraiture  se maintiendrait  jusqu'à  NoSl.  Quand
                                   les pronostics étaient fav,orables, on abattait  les porcs dans les jours
                                   qui  suivaient.

                                        Cet usage  s'était  perdu  depuis  l'arrivée  du  congélateur  domes-
                                   tique.  Mais  cette  année,  rien  n'est  comme  d'habitude.  Aussi,  sans
                                   se chercher  des raisons,  les  habitants de la  montagne  ont  décidé  de
                                   faire  revivre la tradition.  Et, dans ces contenants  étranges,  on  avait
                                   transporté  jusqu'à  la  gra~nge de Louis-Philippe  Landry  six  cochons
                                   prêts  pour  l'abattage.
                                        Aidé de Nicolas  Francœur,  Louis-Philippe  avait  dressé  l'indis-
                                   pensable  appareil : une meule  à eau, qui  servait  autrefois à  aiguiser
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