Page 82 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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Après le départ du cousin de Montréal, la vie avait repris le
fil terre-à-terre des jours ordinaires. La noirceur venait de plus en
plus tôt et il neigeait, par intermittences. Cette visite inattendue
avait laissé Marie et Louis-Philippe plus taciturnes que jamais. Cer-
tains soirs, alors que Pierre était retenu à l'Anse-au-Sable par un quel-
conque événement scolaire ou sportif, la maison s'enveloppait d'un
silence de cimetière.
Même si elle avait écouté sans protester les propos troublants
d'Honoré, Marie n'était pas ignorante des avantages appréciables
de la ville. Chaque fois qu'elle venait, Julie lui parlait théâtre, ciné-
ma, magasinage. Par la pensée, elle se transportait parfois dans ce
monde fantastique où tous les agréments de la vie sont à la portée
de la main. Quant à Louis-Philippe, il était envahi par le doute.
Toutefois, il se gardait bien de dévoiler son âme. L'inquiétude qui
les tourmentait ne les empéchait pas de vaquer aux occupations
routinières, elle à ses torchons et à son fourneau, lui à ses bêtes et
à sa forêt.
Dans cet état de forte tension morale, Marie percevait les évé-
nements avec une acuité qui souvent la blessait. Chaque fois
que Pierre revenait de l'école et que Louis-Philippe rentrait d'une
course à La Morendière ou d'une visite chez un habitant de Terre-
Haute, elle redoutait une mauvaise nouvelle.
Un soir qu'il entrait en retard, Louis-Philippe lança maladroite-
ment, tout en retirant ses bottes :