Page 39 - La Généalogie retrouver ses ancêtres

Son inspection des environs terminée, Louis-Philippe s'était
dirigé vers la porte de la cuisine, à l'arrière de la maison. II s'était
arrêté un moment et, appuyé sur la main courante de l'escalier qui
conduit au perron, il humait le vent et examinait le firmament.
-Tiens ! se dit-il tout haut, v'Ia que le ciel se graisse au nordet
et que Ies fils du téléphone se lamentent. On aura du mauvais temps
avant longtemps.
Il frappa à la lourde porte en pin et entra sans attendre qu'on
l'y invite. Enfoncé dans sa grosse berceuse en bois d'érable, Eugène
Soucy bourrait consciencieusement sa pipe. Tout en pressant un
tabac grossier dans le fourneau de son brûle-gueule, il jeta un coup
d'ail vers le nouvel arrivant et dit :
-On commençait à croire que tu viendrais pas ! Marie n'est
pas avec toi !
-Elle est descendue à l'Anse-au-Sable avec Louis et Émilienne.
J'crois pas qu'ils remontent avant In fin de l'après-midi.
- Aurais-tu vu Éloi Leblanc en passant ?
-Je n'viens pas de la maison. J'ai passé la matinée dans le
bois.
-T'as tué queuqu'chose? s'enquit Eugène, grand chasseur
devant I%ternel.
- J'avais pas envie de chasser ; j'voulais seulement voir la forêt,
la montagne, le ruisseau de la grande coulée.
-Reste pas planté là. Ôte ta bougrine et viens t'assire.
Puis, sans regarder personne, mais s'adressant à tous ceux qui
ctaient là, Eugène Soucy continua d'une voix éraillée :
-A part Louis et Éloi, i manque encore Alfred Daigle.
Quelqu'un reprit, comme un écho :
-Alfred Daigle, j'crois pas qu'i vienne. Sa fille Luce m'a dit
hier que toute la famille quittait Terre-Haute avant l'hiver.

-J'sus pas surpris, enchaîna Xavier Cyr, i'est pas attaché
icitte, ses enfants encore moins. 1 n'sont pas vraiment de Terre-
Haute.