Page 25 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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cher des autres hommes.  Un  soir  il  avait été frappé par  le tragique
                                  des événements : désordres. guerres, famine, grèves, injustice.  Avant
                                  de se coucher,  il  se faisait  à  lui-même  la  réflexion  suivante :
                                       -C'est   incroyable  qu'au  vingtième  siècle  des  enfants  meurent
                                  de  faim et  que des hommes  s'entre-tuent  pour  des motifs  qui  n'ont
                                  rien  à  voir  avec  la  défense  de la  liberté.  Ces hommes  qui  peuvent
                                  aller dans la  lune, ils  n'ont  pas  beaucoup  mieux  réussi  avec  la  Pla-
                                  nète que nous  avec Terre-Haute !
                                       Quand  il  eut  fait  son  bilan,  il  se dit  que,  tout  compte  fait,  il
                                  ne changerait  pas  son sort  avec celui de la majorité  des  autres hom-
                                  mes.  Après tout, quand il  est  arrivé sur la  montagne  il  ne  possédait
                                  rien, il n'avait  que des dettes.
                                       II pensait  à Marie.  Pour elle, c'est  différent.  Sa  famille  était  à
                                  L'aise.  Elle aurait fort bien  pu  se marier  à  un  professionnel  - un
                                                                                          à
                                  médecin  comme  sa sœur Célina - ou à un  commetGant  de  l'Anse-
                                  au-Sable  ou  de  La  Morendière  et  avoir  une  existence  bourgeoise.
                                  Pourquoi a-t-elle  accepte la vie  mde de la montagne et de la  terre ?
                                  11 fallait  qu'elle  l'ait  drôlement  aimé.  Il eut  des  remords  de l'avoir
                                  trop  longtemps  délaissée.
                                       Marie est l'aînée  des trois filles du marehand  général de l'Anse-
                                  au8able.  Marguiller  et  secrétaire  de  la  commission  scolaire,  son
                                  père  était  bien  connu  dans  la  région.  Pendant  plus  de  dix  ans,  il
                                  avait  agi  comme  organisateur  politique  et  dispensateur  du  petit
                                  patronage  local.

                                       Marie  était  institutrice   l'école  No  8  de  La  Morendière.  Le
                                  samedi, elle remplissait  la  fonction  de  commis au magasin.  C'est  là
                                  qu'ils  s'étaient  connus.  Chaque fin  de semaine,  Louis-Philippe  trou-
                                  vait un prétexte pour arrêter et causer un  brin  avec la  belle caissière.
                                  Cette  dernière  n'avait  pas tardé  à  comprendre  les  vraies  raisons  de
                                  cene assiduité.  Comme il  était  distingué,  assez  beau  garGon  et  qu'il
                                  savait  parler  aux  femmes,  il  lui  avait  plu.  Longtemps,  cependant,
                                  elle  avait  feint  d'ignorer  les  attentions  du  jeune  homme.  Eue  crai-
                                  gnait  des oppositions  du côté de sa famille.  Ses  sœurs,  surtout,  en-
                                  tretenaient  des préjugés  contre les  fils d'habitants.
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