Page 77 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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Il Y avaIt aussi à droite de chaque couvert une coupe ou
un gobelet d'argent de différentes formes et de différentes
grandeurs 1: les uns de la plus grande simplicité, avec ou sans
anneaux, les autres avec des anses; quelques-uns en forme de
calice, avec ou sans pattes, ou relevés en bosse; beaucoup
aussi étaient dorés en dedans.
Une servante, en apportant sur un cabaret le coup d'ap-
pétit d'usage, savoir, l'eau-de-vie pour les hommes et les
liqueurs douces pour les femmes, vint prévenir qu'on était
servi. Huit personnes prirent place à table: M. de Beaumont
et son épouse, Mme Descarrières leur sœur, le curé, le capi-
taine Marcheterre, son fils Henri, et enfin Jules et Arché.
La maîtresse de la maison donna la place d'honneur au vé-
nérable curé, en le plaçant à sa droite, et la seconde place
au vieux marin, à sa gauche.
Le menu du repas était composé d'un excellent potage
Oa soupe était alors de rigueur, tant pour le dîner que pour
le souper), d'un pâté froid, appelé pâté de Pâques, servi, à
cause de son immense volume, sur une planche recouverte
d'une serviette ou petite nappe blanche, suivant ses propor-
tions. Ce pâté, qu'aurait envié Brillat-Savarin, était composé
d'une dinde, de deux poulets, de deux perdrix, de deux pi-
geons, du râble et des cuisses de deux lièvres: le tout recou·
vert de bardes de lard gras. Le godiveau de viandes hachées,
sur lequel reposaient, sur un lit épais et mollet, ces richesses
gastronomiques, et qui en couvrait aussi la partie supérieure,
était le produit de deux jambons de cet animal 9ue le juif
méprise, mais que le chrétien traite avec plus d'egards. De
gros oignons, introduits çà et là, et de fines épices, complé-
taient le tout. Mais un point très important en était la cuis-
son, d'ailleurs assez difficile; car, si le géant crevait, il per·
dait alors cinquante pour cent de son acabit. Pour prévenir
un événement aussi déplorable, la crofite du dessous, qui re:-
couvrait encore de trois pouces les flancs du monstre culi·
1. Quelques familles canadiennes avaient conservé l'usage des
gobelets d'argent pendant leurs repas, il y a près de soixante ~
dix ans. On y ajoutait les verres à patte de cristal au dessen,
dont les convives se servaient indifféremment, suivant leur soif
plus ou moins vive. L'ivrognerie était alors, d'ailleurs, un vico
inconnu à la première classe de la société canadienne.
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