Page 76 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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forme d'un baril, en porcelaine bleue et blanche, avec robi-
net et cuvette, qui servait aux: ablutions de la famille. A un
angle opposé, une grande canevette, garnie de flacons carrés,
contenant l'eau-de-vie, l'absinthe, les liqueurs de noyau, de
framboises, de cassis, d'anisette, etc., pour l'usage jour-
nalier, complétait l'ameublement de cette salle.
Le couvert était dressé pour huit personnes. Une cuillère
et une fourchette d'argent, enveloppées dans une serviette,
étaient placées à gauche de chaque assiette, et une bouteille
de vin léger à la droite. Point de couteau sur la table pen-
dant le service des viandes 1: chacun était muni de cet utile
instrument, dont les Orientaux savent seuls se passer. Si le
couteau était à ressort, il se portait dans la poche, si c'était,
au contraire, un couteau-poignard, il était suspendu au cou
dans une gaine de maroquin, de soie, ou même d'écorce de
bouleau, artistement travaillée et ornée par les aborigènes.
Les manches étaient généralement d'ivoire, avec des rivets
d'argent, et même en nacre de perles pour les dames.
1. L'auteur a toujours vu la mode actuelle des couteaux de
table pendant le service des viandes; néanmoins la tradition était
telle qu'il l'a mentionnée plus haut, l'anecdote suivante le con-
firme.
Un vieux gentilhomme canadien, dînant un jour au château
Saint-Louis, après la conquête, se servit à table d'un superbe
couteau à gaine, qu'il portait suspendu à son cou. Son fils, qui
était présent, et qui, suivant l'expression de son père, avait intro-
duit chez lui les couteaux de table avant le dessert, pour faire
l'Anglais, racontait à l'auteur qu'il pensa mourir de honte en
voyant ricaner en dessous les jeunes convives des deux sexes.
Les habitants se servaient toujours, il y a cinquante ans, de leur
couteau de poche pendant les repas; les hommes, de couteaux
plombés. Un forgeron en fabriquait la lame; les manches en bois
étaient ornés de ciselures en étain; et, comme cet instrument
n'avait pas de ressort, le patient était contraint de tenir cons-
tamment la lame assujettie avec le pouce: l'esprit ingénieux de l'ar-
tiste facilitait l'opération au moyen d'un petit bouton, placé à la
partie de la lame attenant au manche. Les habitants s·en ser-
vaient avec beaucoup d'adresse; mais les novices se pinçaient hor-
riblement le pouce: un petit apprentissage était nécessaire.
Les femmes se servaient de couteaux de poche ordinaires,
qu'elles achetaient chez les boutiquiers.
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