Page 305 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
P. 305
Saint-Thomas, qui, lui aussi, avait baptisé et marié tous ses
paroissiens, dont il avait enterré trois générations. Oh, oui 1
c'est bien le modèle que j'avais sous les yeux en écrivant
" La débâcle ». J'ai beaucoup connu le respectable monsieur
VI~rrault, depuis mon enfance jusqu'à sa mort. C'était un
prêtre d'un zèle inextinguible, mais aussi indulgent pour les
alltres qu'il était sévère pour lui-même. Il aimait la société,
et se dépouillait, dans ses rapports avec elle, de la rigidité
nécessaire au ministre des autels quand il exerce ses fonc-
tions. Ce n'était plus alors que le vieillard gai et aimable, se
lÏ'\rant avec entrain aux charmes de la causerie.
La mansuétude du saint homme fut mise un jour à une
rude épreuve, à un souper chez le seigneur du lieu.
J'ai déjà dit, dans une note précédente, que le seigneur
Couillard, père de mon ami le docteur Couillard, si avan-
tageusement connu dans le district de Québec, était un sa-
vant en us; il parlait les langues latine, anglaise et allemande
avec autant de facilité que la sienne propre. Sa mémoire
éblit si prodigieuse, qu'il serait devenu sans doute un linguiste
di!tingué en Europe, où il aurait eu la facilité d'étudier plu-
sieurs idiomes des nations étrangères. Un régiment de troupes
allemandes était stationné à Saint-Thomas; monsieur Couil-
lard fit la connaissance des officiers, et au bout de trois
mois, il parIait l'allemand aussi bien qu'eux. Mais grand fut
son désespoir, après le départ de ses nouveaux amis, de
n'~.voir personne pour converser dans une langue qu'il affec-
tionnait.
Il apprend, le jour même du souper dont j'ai parlé plus
haut, qu'un docteur allemand, arrivé de la veille, avait élu
domicile dans le village de Saint-Thomas. Quelle bonne for-
tune pour lui! Il se rappelle les moments agréables qu'il
avait passés peu d'années auparavant dans la société du
dodeur Oliva; marié à sa cousine germaine, médecin aussi
distingué dans sa profession que par ses vastes connaissances
littéraires: sans doute que tous les docteurs allemands doi-
veut se ressembler, à peu de chose près. Il se rend aussitôt
Chl~Z l'étranger, qui lui fait l'accueil le plus aimable. Ils con-
versent tous deux en allemand pendant deux heures, à se
- 306-