Page 293 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
P. 293

CHAPITRE TROISIEME




                                          (a) J'avais vingt ans lorsque je rendis visite à la prétendue
                                        sorcière de Beaumont. Je retournais de Saint-Jean-Port-Joli
                                        à Québec, après un court voyage chez mes parents. Mon père
                                        m'avait donné, à cause de mes péchés, je crois, un de ses
                                        cen!;itaires pour charretier; c'était un habitant très à l'aise,
                                        mai, qui lui devait une quinzaine d'années d'arrérages de
                                        cem, et rentes. Mon père ainsi que mon grand-père avaient
                                        pour principe de ne jamais poursuivre les censitaires: ils at·
                                        tendaient patiemment: c'est un mal de famille. Mon conduc-
                                        teur de voiture était très reconnaissant, à ce qu'il paraît,
                                        de I;ette indulgence! C'était un de ces hableurs insolents,
                                        bavard impitoyable, comme on en rencontre quelquefois
                                        dan:; nos paroisses de la côte du Sud, et qui descendent
                                        presque tous de la même souche. Obligé, en rechignant, de
                                        s'acquitter envers le père d'une dette légitimement due, il
                                        s'en dédommageait amplement sur le fils par une avalanche
                                        de sarcasmes grossiers, de bas quolibets, à l'adresse des curés,
                                        des seigneurs, des messieurs qu'il gratifiait à n'en plus finir
                                        du nom de dos blancs, d'habits à poches, etc. 1
                                          J'étais résigné à endurer ce supplice avec patience, sous
                                        l'impression qu'il ne cherchait qu'un prétexte pour me planter
                                        là. Arrivé à la paroisse de Beaumont, il me parla de la mère
                                        Nol,~tte, la femme savante, la sorcière qui connaissait le

                                          1. Le mot injurieux «dos blancs» venait probablement de la
                                        poudre que les messieurs portaient journellement, et qui blan-
                                        chisiiait le collet de leurs habits.
                                                             -  294-
   288   289   290   291   292   293   294   295   296   297   298