Page 224 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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le zèle de chacun, qu'il reconstruisait sa propre demeure.
                                  Tous ces braves gens tâchaient de faire oublier à leur sei-
                                  gneur des malheurs qu'eux-mêmes avaient pourtant éprou-
                                  vés, mais qu'on aurait pu croire qu'eux seuls avaient mérités.
                                  Avec .ce tact délicat dont les Français sont seuls suscepti-
                                   bles, ils n'entraient jamais dans les pauvres chambres que la
                                  famille s'était réservées dans le moulin, sans y être conviés:
                                  on aurait dit qu'ils craignaient de les humilier, S'ils avaient
                                  été affectueux, polis envers leur seigneur dans son opulence,
                                  c'était maintenant un culte, depuis que la main de fer du
                                  malheur l'avait étreint 1.
                                     Il n'y a que ceux qui ont éprouvé de grands revers de
                                   fortune, qui ont été exposés à de longues et cruelles priva-
                                   tions, qui puissent apprécier le contentement, la joie, le bon-
                                   heur même de ceux qui ont en partie réparé leurs pertes.
                                  qui commencent à renaître à l'espérance d'un heureux ave-
                                   nir. Chacun auparavant avait respecté le chagrin qui dévorait
                                  le capitaine d'Haberville: on ne se parlait qu'à demi-voix
                                   dans la famille; la gaieté française avait semblé bannie pour
                                   toujours de cette triste demeure. Tout était maintenant chan-
                                  gé comme par enchantement.
                                     Le capitaine, naturellement gai, riait et badinait comme
                                   avant ses malheurs; les dames chantaient sans cesse en s'oc-
                                   cupant activement de soins du ménage, et la voix sonore
                                   de mon oncle Raoul réveillait encore, dans le calme d'une
                                   belle soirée, l'écho du promontoire.
                                     Le fidèle José se multipliait pour prouver son zèle à ses
                                   maîtres; et, pour se délasser, il racontait aux voisins, qui ne
                                   manquaient jamais de venir faire un bout de veillée, les tra-
                                   verses, comme il les appelait, de son défunt père avec les sor-
                                  ciers de l'Ile d'Orléans, ses tribulations avec la Corriveau,

                                    1. Historique. L'auteur se plaît à rappeler, avec bonheur, les
                                  témoignages d'affection des censitaires de Saint-Jean-Port-Joli
                                  envers sa famille, depuis plus de cent ans.
                                    Lors de l'abolition de la tenure seigneuriale, il y a neuf ans,
                                  les marguilliers de l'œuvre et fabrique de la paroisse de Saint-
                                  lean-Port-Joli décidèrent que, nonobstant l'acte du parlement à ce
                                  contraire, je jouirais du banc seigneurial ma vie durant.
                                    Cette preuve si touchante d'affection me fut communiquée par
                                  Pierre Dumas, écuyer, alors marguillier en charge.
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