Page 221 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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- J'apprécie, capitaine de Locheill, les sentiments qui
vous font agir: notre souverain ne doit pas être privé des
services que peut rendre, dans un grade supérieur, celui qui
est prêt à sacrifier son avenir à une dette de gratitude; vos
amis resteront.
- Merci, mille fois merci, monsieur le général, dit Ar-
ché: comptez sur mon dévouement à toute épreuve, quand il
me serait même ordonné de marcher seul jusqu'à la bouche
des canons. Un poids énorme pesait sur ma poitrine; je me
sens maintenant légl!r comme le chevreuil de nos montagnes.
De toutes les passions qui torturent le cœur de l'homme,
le désir de se venger et la jalousie sont les plus difficiles à
vaincre: il est même bien rare qu'elles puissent être extirpées.
Le capitaine d'Haberville, après avoir écouté, en fronçant
les sourcils, le récit de monsieur de Lacorne, se contenta
de dire:
- Je vois que les services de monsieur de Locheill ont été
appréciés à leur juste valeur: quant à moi, j'ignorais lui devoir
autant de reconnaissance.
Et il détourna la conversation.
Monsieur de Saint-Luc regarda alternativement les autres
membres de la famille qui, la tête basse, n'avaient osé pren-
dre part à la conversation, et, se levant de table, il ajouta:
- Ce répit, d'Haberville, est un événement des plus heu-
reux pour toi: car sois persuadé que, d'ici à deux ans, il te
sera libre de rester en Canada ou de passer en France. Le
gouverneur anglais a encouru une trop grande responsabilité
envers son gouvernement, en vouant à une mort presque
certaine tant de personnes recommandables, tant de gentils-
hommes alliés aux familles les plus illustres, non seulement
du continent, mais aussi de l'Angleterre, pour ne pas cher-
cher, en se conciliant les Canadiens, à étouffer les suites de
cette déplorable catastrophe.
Maintenant, adieu, mes chers amis; il n'y a que les âmes
pusillanimes qui se laissent abattre par le malheur. Il nous
reste une grande consolation dans notre infortune: nous
avons fait tout ce que l'on pouvait attendre d'hommes
courageux; et, s'il eût été possible de conserver notre nouvelle
patrie, nos cœurs, secondés de nos bras, l'auraient fait.
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