Page 99 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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                lacs les plus riches en castors, er qu'on y enfermait les sauvages
                pour leur faciliter la chasse de ces précieux amphibies, afin de
                s'acquitter plus vite envers leurs créanciers.  Ces murs, ces
                grillages en fer lui avaient semblé autant de barrières que
                nécessitait la prudence pour garder ces trésors.
                  ]'étais jeune, trente·trois ans, âge où commence à peine la
                vie; j'avais des talents, de l'énergie, et une foi robuste en moi-
                même.   Prenez, dis-je à mes créanciers, tout ce que je possède,
                mais tenoncez à VOtre droit de contrainte par corps: laissez-moi
                toute liberté d'action, et j'emploierai toute mon énergie à vous
                satisfaire.  Si vous paralysez mes forces, c'eSt vous faire tort à
                vous-mêmes.   Ce raisonnement, si simple pourtant, était au-
                dessus de l'intelligence de l'homme civilisé: mon Itoquois, lui,
                l'eût compris; il aurait clit: • Mon frère pas capable de prendre
                castor, si le visage pâle lui ôte l'esprit, et lui lie les mains ».
                Eh bien, mon ami, mes créanciers n'ont tenu aucun compte de
                ce taisonnement si aisé cependant à comprendre, et ont tenu
                cette épée de Damoclès suspendue sur ma tête pendant trente
                ans, terme que leur accordaient les lois du pays.
                  -Mais, c'était adorable de bêtise! s'écria Jules.
                  - Un d'eux, cependant, continua le bon gentilhomme en
                souriant tristement de la saillie de Jules, un d'eux, dis-je, d'une
                industrie charmante en fait de tortures, obtint contrainte par
                corps, et, par un raffinement de cruauté digne d'un Caljgula,
                ne la mit à exécution qu'au bout de dix-huit mois.  Peut-on
                imaginer un supplice plus cruel que celui infligé à un homme
                entouré d'une nombreuse famille, qui la voit pendant dix-huit
                mois trembler au moindre bruit qu'elle entend, frémir à la vue
                de tout étranger qu'elle croit toujours porteur de l'ordre d'incar-
                cération contre ce qu'elle a de plus cher!  Ce qui m'étonne,
                c'est que nous n'ayons pas succombé sous cette masse d'atroces
                souffrances.
                  Cet état était si insupportable que je me rendis deux fois
                auprès de ce créanciet, le priant, au nom de Dieu, d'en finir et
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