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Si nous insistons au départ sur l'objectivité du message carto-
graphique, c'est que l'essentiel du texte qui suit tend plutôt A démontrer
le contraire. De fait. quelle que soit l'apparente simplicité d'une carte,
l'étude de la signification de son contenu ne relBve pas nécessairement
de I'bvidence. Ses multiples expressions (facture et diversité du contenu)
ainsi que sa nature en font un objet d'étude à la fois riche et complexe.
Mais si l'on postule que la carte est généralement construite B partir de
composantes réelles de l'espace, à cet égard elle peut prétendre à une
certaine objectivit6.
Par ailleurs, il est également possible de considdrer que la carte
est le regard qu'un auteur a porté un jour sur un univers spatial De ce
point de vue, elle est une proposition d'une organisation sélective des
différents éléments du paysage physique et culturel, telle que la perçoit
un individu ou une société. Si I'on tient compte de ces postulats, l'étude
de le carte devrait donc permettre de distinguer ce qui constirue le mes-
sage plus ou moins informel de ce qui reléve de la représentation rslative-
ment objective de l'espace. Par message informel ou implicite, nous en-
tendons ce qui est relatif 3 I'intentionnalitk du message cartographique.
La carte n'est pas que descriptive. elle est aussi le reflet d'un contexte
social, politique et économique. Cette distinction conduit idéalement à
repérer des éléments de contenu qui sont révélateurs du contexte.
II existe une multitude de contenus cartographiques. allant du dis-
cours idéologique presque pur - les cartes de type T en 024 en sont un bel
exemple (figure 1) - jusqu'à la représentation la plus simple et la plus
cartésienne possible du territoire ou de l'espace territorialisé - les plans
de rues et de fermes - qui, elle aussi, est porteuse d'une intention.
Ces deux types de représentation semblent extremes. mais un examen
détaillé révélera qu'ils sont comparables, étant tous deux le résultat du
24. Les cartes de type T en O, ou plus précis8ment les T-O rnappamundi, sont des
caries europ&ciines gbnkralement associees au Moyen Àge. merne si de telles
cartes ont 8ti3 produites oks le III* siAcle er que les dernières daient du wF, Ces
cartes d'inspiration chrétienne partagent le monde en trois continents I'Asie,
l'Afrique et l'Europe Ceux-ci sont entoures par un océan circulaire qui forme le O
Ils son1 sépares par ie Nil (entre l'Afrique e: l'Asie) et le Don (enire l'Asie el l'Eu-
rope), Heuves qui forrnenr la tige horizontale du T La Méditerraiit!e sépare l'Europe
de I'Afriqiie et constiiue la tigo verricale du T Ces reprkseciiations du monde sont
habituellement enrichies de nombreuses iconographies correspondani aux trois
contrnenrs et mertenl en Bvidence les trois races que I'on ConsidBre ccmrne des-
condani des fils de No6 (Sam en Asie. Cham en Afrique et Japhet en Europe). Sur
csç carras, I'Asie est placee en haut de façon que la ville de Jérusalem se trouve au
ccnrre. Souvent, on voil une rebrésenlalion de I'arclie de Nol. au sommet de I'Asie
La plupart des ouvragessur l'histoire de la cartographie traiienr de ce vpe de carte,
mais les plus rbcenis travaux. qui sont on mëme temps les plusdémillés. sonr ceux
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de David WOODWARD 9871