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En 1'755 et immediatement après la prise du fort de Beausejoiir I'ami-
rau Bowskawen qui se trouvoit alors à Halifax fit demander aux habitans
de port Royal une deputation de 70 des principaux d'entre eux, et a ceux
!
des mines une pareille deputation de 30 chefs de fanulles, et leur fit dire
que c'étoit pour conferer avec eux sur des propositions qu'il avoit a leur
faire, et non sur des ordres qu'il eut a leur donner.
Il traitait donc alors avec eux, comme avec des sujets qui appartenoient
à la France, et qui ne i'etoient aucunement du Roy de la grande Bretagne.
La suite de ce simple recit historique et fidel va pleinement jiistiiier
l'un et l'autre. .ci
A peine ces 100 accadiens furent-ils arrivés à Halifax sur la foy et la
sureté d'une deputation demandée et convoquée (et qui par consequent de-
voit les mettre a couvert de toutes surprises et de tous niauvais traitemens)
que l'amiral anglois leur dit en es ména~ant. qu'il les envoyoit cherclier pour
sçavoir, et sans aucune replique de leur part, (que par uii oui, ou un non)
,s'ils vouloient prendre les anries pour le Roy de la grande Bretaae contre
le Roy de France son ennemi, quoiqu'il n'y eiit encore aucune declaratioii
de guerre entre ces deux puissances.
La lhi reflexion qui nait de cette proposition du general anglois, c'est
qu'il ne regardoit donc pas encore les accadienç de port Royal et des mines
comme sujets du Roy de la grande Bretagne quoiqu'ils fussent restés sous
.son gouvernement, et sur la foy du traité d'U,treclit, et des droits, pririle-
ges, et exceptions qui y avoient été pour eux stipulés et accordés. Reste
donc à sçavoir si dapuis ce tems là il s'est passé quelque chose de leur part
ou s'ils ont formés quelques nouve2ux engagemens, qui les ayent constitués
sujets du Roy de la grande Bretagne.
La suite du journal prouve le contraire. A peine les 100 deputés du
port Royal et des mines eurent ils repondu à I'aniiral anglois qu'ils prefc-
reroient la mort plus tot que de manquer à l'attachement qu'ils avoient
.pour leur religion, et à la fidelité qu'ils devoient à leur seul et legitime sou-
verain, qu'il les fit investir par 500 hommes armés et conduire à I'Ile
Danville (autrefois de la Raquette) ou il les fit garder a vue pendant I'es-
pace de 6 a 7 semaines avec defense de parler a personne et de conferer
avec qui que ce fut.. . Mais onalgré toutes ces precaiitions le général an-
$lois, voyant qu'il ne pouvoit rien gagner sur eux et sur la representation
qu'on luy fit, que ce n'étoit pas ainsi qu'on traitoit des deputés d'une na-
tion aussi respectable que celle de la France, il se determina à les renvoyer
et à prendre tou.tes les precautions nécessaires pour les faire enlever et dis-
perser.. . mais ce n'est pas là où s'est terminée la persécution qu'ils ont
eprouvée. Plusieurs s'etant echappés de leurs mains et refugik dans les
bois prirent la precaution de se mettre sur la deffensive.. . Les ptes voi-
sins tels que ceux qui se trouvoient sous le fort de Beaiasejour et sur les ri-
vières de Chipoudy, Petkoudiak et Memramkouk ont été differentes fois
attaqués par les Anglois qui ont brulés leurs habitations, et fait nombre de
prisonniers, qu'ils ont renvoyés et fait passer en France comme sujets du