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VISAGES
L’œuvre
Jean Marc Larivière est habité par l’art
et ses multiples formes d’expression. Le
cinéma lui offre la possibilité unique de
créer une interpénétration de diverses
pratiques artistiques, par osmose, terme
qui définit bien sa démarche créatrice.
Qui dit osmose, dit perméabilité,
diffusion lente par transfert. Déjà à
l’étape de la conception, il met le temps
nécessaire pour mûrir ses projets; il
ne travaille pas dans l’instantanéité
ni dans l’improvisation. Ses idées
« percolent » et passent par une phase
d’analyse rigoureuse avant que tous les
fils soient rassemblés dans une synthèse
qui fait sens. Par exemple, son film
Effractions a pris neuf ans de gestation et
de production. Il écrit ses films comme
des poèmes, démarche qui n’est pas sans
Affiche du film Effractions. Source : rappeler celle de Jean Cocteau.
collection personnelle J. M. Larivière.
Ses transferts artistiques, osmotiques, il les réalise
autant avec une romancière acadienne (France
Daigle), des poètes (Patrice Desbiens, Robert Dickson,
Pierre Albert), des danseuses (Nana Gleason, Julie
West, Mireille Feyseau) qu’avec un groupe de
chanteurs rock (Cowboy Junkies). Il abat les cloisons
entre les formes d’arts, qui fusionnent devant la
lentille de sa caméra.
Dans le laboratoire de danse The Nine Dimensions, par
exemple, l’artiste visuelle américaine Wendy Shuster
produit ses dessins en temps réel, laissant les traits
suivre les mouvements et les lignes de la danse. Il
y a ici mariage entre danse, musique, peinture et
cinéma. L’ouïe, la vue, le mouvement sont convoqués
simultanément et composent par osmose l’œuvre
subtile que le réalisateur fixe sur pellicule.
Ses films d’auteur, comme ceux de Godard ou de
Bresson, ne livrent pas le produit d’une réflexion,
mais témoignent d’une réflexion en cours. Cela donne
des films médités aux antipodes de La mélodie du
bonheur ou des films à message. Jean Marc se sert du
cinéma comme d’un outil pour produire des films où
l’action est minimale et dans lesquels le spectateur est
appelé à s’investir.
L’osmose fonctionne aussi avec le roman. À propos
Photos ci-dessus : Tournage et montage du film Effractions. d’Effractions, fiction réimaginée d’après le roman
Source : collection personnelle J. M. Larivière.
de France Daigle, La vraie vie (prix du Gouverneur
60 LE CHAÎNON, ÉTÉ 2021