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SECTION SPÉCIALE : LES CONTES ET LÉGENDES DE L’ONTARIO FRANÇAIS
Contexte socio-économique du
nord de l’Ontario
Les jumelles Dionne sont nées
dans un contexte social difficile,
plus précisément pendant la
Grande Dépression, qui sévissait
depuis 1929. L’argent se faisait
rare. D’ailleurs, la paroisse était
si pauvre que la messe se tenait
dans une cave, faute d’église .
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Malgré le fait que la société
d’État Hydro-Ontario a été créée
en 1906, il n’y avait pas encore
d’électricité à Corbeil en 1934 . Les
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gens s’éclairaient encore avec des
lampes à pétrole. De plus, il n’y
avait ni eau courante, ni téléphone,
ni radio. En revanche, dans
certains villages voisins, comme
Callander, il y avait l’électricité.
Il arrivait que la famille Dionne
Premier ministre de l’Ontario, Mitchell Hepburn avec les quintuplées Dionne. Source : Bibliothèque et se rende le samedi soir chez
Archives Canada/Fonds de la Société Radio-Canada/c019533 Léon Dionne, le frère d’Oliva, en
compagnie d’autres membres de la
famille pour écouter des émissions
l’adolescence . Elle était la seule fille d’une fratrie de sept enfants. Il va
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sans dire qu’elle a dû cesser de fréquenter l’école. Si elle avait pu rester radiophoniques. Ce manque
sur les bancs d’école, elle aurait commencé sa quatrième année . technologique compliquera la
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survie des fillettes prématurées. Le
médecin Dafoe et les sages-femmes
Oliva-Édouard, mieux connu sous le prénom d’Oliva, était fermier depuis
l’âge de 16 ans. L’hiver, il trappait et chassait. Il comptait neuf années ont improvisé un incubateur de
de scolarité : les quatre premières, il les a faites à Corbeil, en français; les fortune pour garder les bébés
cinq dernières, il les a faites à Callander, en anglais. Oliva Dionne a donc prématurés au chaud : on les
passé beaucoup plus de temps sur les bancs d’école que bien d’autres avait étendues dans un panier de
élèves ontariens, que ces derniers soient anglophones ou francophones. boucher, placé devant le fourneau.
En effet, en 1929, seulement 2,5 % des Franco-Ontariens avaient terminé Charlie Blake, un journaliste du
la huitième année, comparativement à 8 % pour tous les élèves de la American de Chicago – une chaîne
province . Oliva possédait une terre de 195 acres, une maison d’un étage de journaux de Hearst –, a été
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et demi et même une voiture! À cette époque, à Corbeil, il n’y avait que le premier à offrir aux Dionne
le prêtre et Oliva qui en possédaient une . Ainsi, la situation financière un incubateur qui fonctionnait
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des Dionne était meilleure que celle d’un grand nombre de familles sans électricité. Il n’y avait pas
vivant dans cette région. Par ailleurs, jeune adulte, Oliva était considéré suffisamment d’espace pour y
comme le meilleur parti de la région. Il avait 30 ans à la naissance des étendre toutes les petites filles.
cinq fillettes. Cécile, Émilie et Marie ont pu en
bénéficier . Annette et Yvonne,
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pour leur part, ont continué de se
partager le panier de boucher.
8 Émile Gervais, « Un père défend ses enfants », dans La Société historique du Nouvel-Ontario (dir.),
North-Bay et les jumelles Dionne, Sudbury : La Société historique du Nouvel-Ontario – Collège du
Sacré-Cœur, p. 44. 12 Gaétan Gervais. op. cit., p. 30.
9 David Welch, op. cit., p. 40. 13 Lucie Brunet, Almanda Walker-Marchand,
10 Ibid. Ottawa, L’Interligne, 1992, p. 27.
11 Pierre Berton. op. cit., p. 26. 14 Pierre Berton, op. cit., p. 73.
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