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NOTRE COMMUNAUTÉ, NOS INSTITUTIONS
Cela s’explique, en partie du moins, par le manque de
personnel enseignant compétent, la situation politique
instable, l’éloignement des milieux ruraux, l’état des
routes pour s’y rendre et le manque d’intérêt d’une
population appauvrie qui doit assumer seul les coûts
de l’éducation.
En 1807, l’assemblée législative du Haut-Canada
adopte la Loi sur l’établissement d’écoles publiques
(Grammar Schools) puis, en 1816, la Loi sur les écoles
communes (Common Schools). Ces lois prévoient des
subventions pour payer le personnel enseignant, à
une époque où l’enseignement relève de l’initiative
privée, souvent soutenu par les communautés
L’École séparée de Field-Badgerow, à Field (Ontario), vers 1910, dont
l’institutrice était Béatrice Lafond de 1910 à 1912. Source : http://images. religieuses. Elles sont modifiées par la suite, afin de
ourontario.ca, collection de la Société historique de Field. préciser les responsabilités des conseillers scolaires et
la distribution des octrois dans chaque district scolaire
Il n’en a pas toujours été ainsi, et ce, même si la du Haut-Canada.
présence française en Ontario remonte à 400 ans. Il y
a un peu plus de 100 ans, en 1912, le gouvernement La période de 1841 à 1876
ontarien interdit en effet l’utilisation du français
comme langue d’enseignement et de communication Après la Rébellion de 1837-1838, lord Durham
dans les écoles de la province. Comment expliquer recommande l’union du Haut-Canada et du Bas-
cette désastreuse tournure d’évènements? Il faut Canada sous un même parlement. Peu après l’Acte
remonter à la période précédant l’adoption des d’union de 1840, l’Est (le Québec) et l’Ouest (l’Ontario)
règlements XVII et XVIII ayant pour objectif du Canada-Uni obtiennent un surintendant et leur
d’interdire le français dans le système scolaire conseil de l’instruction publique respectif.
subventionné par l’État pour comprendre la situation.
La résistance des francophones ontariens à cette Au début de cette période, la diversité des écoles
mesure constitue une étape décisive pour assurer la caractérise l’état du système scolaire du Haut-
survie de notre langue et de notre culture. Canada. Les commissions scolaires dirigées par des
commissaires, élus annuellement par les contribuables,
La période de 1791 à 1840 sont responsables, entre autres, du financement du
système scolaire et de l’embauche et du congédiement
En 1750, la Nouvelle-France comptait 44 petites écoles du personnel enseignant. Au départ, les commissions
où l’enseignement s’effectuait en français . scolaires jouissent d’une autonomie locale importante.
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Leur stabilité et les services qu’elles accordent
Par l’Acte constitutionnel de 1791, la province de dépendent de leurs revenus, qui découlent de la
Québec, colonie anglaise créée suite à la chute de la taxation scolaire fondée sur la valeur des propriétés,
Nouvelle-France en 1760, est divisée entre le Bas- ce qui explique en partie les écarts existant entre les
Canada (aujourd’hui le Québec) et le Haut-Canada écoles de l’époque.
(territoire correspondant en gros au bassin des Grands
Lacs, les « Pays d’en haut », aujourd’hui l’Ontario). Devenu surintendant de l’enseignement dans le
À ce moment, le gouverneur de l’époque, John G. Haut-Canada, Egerton Ryerson, ministre méthodiste,
Simcoe, juge que les écoles du Haut-Canada sont établit entre 1846 à 1876 les fondements d’un système
« honteusement négligées. […] Toute instruction qui scolaire d’État uniforme. Dans son rapport de 1846,
s’est donnée aux enfants, le fut par leurs parents, il recommande de nombreux changements législatifs
durant leurs rares moments de loisirs ». qui incitent le gouvernement à adopter des lois
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visant le contrôle des programmes d’études, le choix
des manuels scolaires ainsi que la formation et la
2 Arthur Godbout, L’origine des écoles françaises dans l’Ontario, Ottawa, certification du personnel enseignant. Cette législation
Éditions de l’Université d’Ottawa, Ottawa, 1977, p. 47. établissait les bases d’un système scolaire élémentaire
3 Ibid., p. 63.
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