Page 405 - Annuaire Statistique Québec - 1918
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364                 LA COLONISATION DE LA
          du Loup jusqu'au Fort Coulonges, distance d'environ deux cent cin-
         quante milles.   J'ai été informé par des gens dignes de foi que le Pays
          jusqu'au Lac Témiscaming, que l'on dit être un aussi grand lac que le
          Lac Champlain, est fertile, et que l'on pourra, dans un temps à venir,
          y faire de bons Etablissemens.  Il y a deux ans Mr. M'Kay envoya ses
          bateaùx au printemps, qui remportèrent trente-six minots de Patates,
          et il les planta sur le bord du Lac Témiscaming, et il m'a dit depuis
          qu'elles étaient très bien venues.  Il emporta aussi des Pois et d'autres
          Graines qui ont aussi très-bien réussi.  Il acheta aussi dans le township
         de Hull un Taureau, quelques Vaches et quelques Veaux, pour mettre
          sur sa terre sur ce Lac."
              La conclusion à tirer de tous ces témoignages était évidente.   La
          province renfermait encore une immense étendue de terres propres à la
          culture, et non colonisées.  D'un autre côté, il y avait surabondance
          de population dans les vieilles paroisses; d'où provenait cette anomalie?
          Du changement de tenure, disaient les membres du Comité, et de ce
          qu'on avait discontinué de concéder les terres en fief et seigneurie.
          Deux propriétaires de seigneuries, membres du Conseil législatif, l'ho-
          norable James Cuthbert, seigneur de Berthier, et l'honorable Roderick
          McKenzie, seigneur de Terrebonne, s'étaient franchement déclarés,
         devant le comité d'enquête, opposés à la tenure en franc et commun
          socage.  Cette tenure, disait le premier, répugne aux habitudes, aux
          coutumes, aux manières et aux préjugés des canadiens français.     "Ils
          la regardent comme un abandon de ce qu'ils ont de plus cher, et la
          considèrent, et, peut-être pas sans raison, comme tendant à renverser
          les im,titutions civiles et religieuses d'une manière lente, mais infail-
          lible".  "Je crois que le système de conces"ions en fief et Reigneurie
          est le meilleur, disait le second, puisque ceux qui sont sous ce système
          ne se plaignent jamais et paraissent les plus heureux du monde".  Enfin,
          meRsire Jerôme Demers, supérieur du Séminaire de Québec, avait
         déclaré que la principale cause qui empêchait les jeunes cultivateurs
         des vieilles campagnes d'aller s'établir dans les cantons nouveaux,
         était le défaut de moyens pécuniaires pour acheter des terres et les
        ,défricher, le manque de communications àvec les centres habités et,
          surtout, l'éloignement où ils se trouveraient des secours de la religion.
          C'est pourquoi les seigneuries les attiraient davantage.    Si dans le
          moment ils n'allaient pas s'y établir, c'est que dans plusieurs le sol y
          était de qualité médiocre, et qu'il n'y avait pas de chemins pour péné-
          trer dans les parties éloignées de ces seigneuries.  Plusieurs seigneurs
          aussi avaient augmenté les rentes d'une manière excessive.
              Les membres du comité concluaient donc leur premier rapport
          en disant que, malgré certains désavantages,la tenure en fief et seigneurie
         était encore celle qui convenait le mieux au pays, que la tenure en franc
          et commun     socage avait été introduite ici en contravention aux
          instructions royales, par des individus chassés des anciennes colonies
          anglaises, lesquels avaient réussi à s'emparer des principales charges
          administratives et à faire prévaloir une politique contraire à l'intérêt
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