Page 251 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
P. 251
d'ennemis près de nous, ils se remirent en marche. Je deman-
d,~i au .Peti~-Etienne, chef ~es Hurons, qui paraissait inquiet,
s Il.cra!gnalt quelque.,surpnse: - c Pas que je sache, fit-il,
maIS, a notre premlere rencontre avec l'ennemi, tu seras
blessé à la même place où tu as ressenti la douleur.,. Je ne
fis qu'en rire; ce qui n'empêcha pas que deux heures après,
unl~ balle iroquoise me traversa la cuisse au même endroit,
sans, heureusement, fracturer l'os (a). Non, messieurs, les
prèsages ne m'ont jamais trompé.
.- Qu'en pensez-vous, monsieur le chevalier? dit le curé.
.- Je suis d'opinion, fit mon oncle Raoul, que voici le
vil11 du dessert sur la table, et qu'il est urgent de l'atta-
qUl~r 1•
.- Excellente décision 1 s'écria-t-on de toutes parts.
.- Le vin est le plus infaillible des présages, dit Jules, car
il annonce la joie, la franche gaieté, le bonheur enfin; et,
pour preuve de son infaillibilité, voici notre ami de Locheill
qUi entre dans l'avenue: je vais aller au-devant de lui.
.- Vous voyez, mon cher Arché, dit le capitaine en l'em-
bn.ssant, que nous vous avons traité sans cérémonie, comme
l'enfant de la maison, en nous mettant à table après une
demi-heure d'attente seulement. Connaissant votre exacti-
tude militaire, nous avons craint que des affaires indispen-
sables ne vous empêchassent de venir.
.- J'aurais bien été peiné que vous m'eussiez traité autre-
ment que comme l'enfant de la maison, reprit Arché. J'avais
bien pris mes mesures pour être ici ce matin de bonne heure;
mais j'avais compté sans l'agréable savane du Cap-Saint-
Igl1ace (b). Mon cheval est d'abord tombé dans un pot-à-brai,
d'où je ne l'ai retiré, après beaucoup d'efforts, qu'aux dé-
pens de mon harnais, qu'il m'a fallu raccommoder comme
j'ai pu. Une des roues de ma voiture s'est ensuite brisée dans
une: fondrière; et j'ai été contraint d'aller chercher du secours
à l'habitation la plus proche, distance d'environ une demi-
lieue, enfonçant souvent dans la vase jusqu'aux genoux, et
mort de fatigue.
1. Autrefois le vin ne s'apportait sur la table ordinairement
qu'au dessert; les domestiques, employés pendant le service des
viandes, faisaient alors l'office d'échansons.
- 252-