Page 12 - monseigneur
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déménagions dans la grand-maison, ce qui ménageait le
                               chauffage. C'était plus chaud et plus agréable, car les fenêtres
                               donnaient du côté du chemin. Nous avions donc connaissance
                               de tout ce qui se passait: les habitants qui allaient au village
                                pour des réparations, les journaliers qui passaient leur temps
                               en petits tours dans le voisinage. Il n'y avait pas grand-chose
                               à voir à ce moment de l'année. Les hommes réparaient les
                               attelages, allaient faire le bois de chauffage pour l'été suivant
                               et faisaient le train de la grange, c'est-à-dire soignaient les
                                animaux et les nettoyaient. Entre-temps, ils se chauffaient
                                près du poêle et fumaient la pipe. Ma mère les dérangeait
                               souvent pour aller au poêle, et ça grognait! Elle trouvait ça
                               bien encombrant, des hommes dans la maison l'hiver, quoique
                               ce fût bien commode de les avoir!
                                   Notre maison, qui faisait face au chemin et au Petit Che-
                               nail, avait un grand perron sur le devant, qui faisait la largeur
                               de la maison. La porte était au milieu. Celle-ci ne s'ouvrait
                               que pour les grandes occasions: la visite de la paroisse avec la
                               quête de l'Enfant-Jésus, les réceptions de mariage, les exposi-
                               tions des morts et aussi pour l'aération durant l'été. Vis-à-vis
                               de la porte, il y avait une petite allée jusqu'au chemin, et, de
                               chaque côté, de la pelouse. Mon père avait acheté et planté
                               deux arbres d'agrément. Je ne sais le nom exactement; nous
                               les appelions des chênes de montagne. Ces arbres avaient des
                               grappes rouges; c'était des cormiers, je suppose. Nous les fil-
                               les, nous jouions à la mère sur ce perron; nous avions des
                               poupées avec des têtes en pierre (ou porcelaine), qui étaient
                               très jolies. Nous avions aussi des sets (services) de vaisselle
                               en pierre, tous bien décorés !
                                   Le chemin faisait le tour de la maison. Nous pouvions
                               donc arriver d'un côté ou de l'autre. À l'est, c'était le jardin,
                               entouré d'une clôture, pour le protéger des poules qui étaient
                               libres et d'autres animaux aussi. Il y avait une grosse plaine
                               (érable) à ce coin du jardin. Le chemin passait entre celui-ci


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