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NOTRE COMMUNAUTÉ, NOS INSTITUTIONS
Kapuskasing, 1937 : le temps de la Grande Dépression et de la Deuxième En 1991, les employés de Spruce Falls et les résidents ont acheté
Guerre mondiale, le développement urbain ralentira. Ensuite, la ville l’usine, avec l’aide de Tembec. Avant, il y a eu des rassemblements et
s’étendra. Photo : ministère de la Défense, Bibliothèque et Archives Canada . des manifestations pour sauver l’usine et la ville. Photo : Peter Barbour,
Archives de la Ville de Kapuskasing.
Le gouvernement s’engage donc dans la planification L’usine aurait agi de connivence avec le maire, qui
urbaine pour éviter que se répètent les expériences de aurait contourné le conseil municipal au nom de la
villes champignons ou de villes mono-industrielles. croissance.
Le gouvernement se lance : Kapuskasing sera donc L’achat de terrains par les employés n’est encouragé
un projet à la fois industriel et social, où les saines ni par Spruce Falls ni par la Ville. Les ouvriers sont
habitudes de vie seront promues et où l’économie les locataires de leur employeur. Des « shacktowns »
sera diversifiée. Il supervise l’entreprise qui a acheté apparaissent — comme Brunetville et Val Albert — et
une « limite de bois » en 1918 : l’Américaine Kimberly sont exclus des limites territoriales .
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Clark. Elle fonde l’usine Spruce Falls sur la promesse
d’un nouveau modèle favorisant le développement Sur le territoire municipal, Spruce Falls aménage
municipal pérenne. le parc et construit l’aréna et un centre récréatif à
l’intention de ses ouvriers, un hôtel, l’hôpital et
Kapuskasing se dessine. Les objectifs du exploite le service d’ambulance. Bref, la petite ville
gouvernement seront-ils atteints? Jusqu’à un certain ressemble drôlement à une ville de compagnie.
point. On y reviendra.
Il faut quelques décennies avant que l’industrielle
Les Kapuskois et Kapuskoises demeurent aujourd’hui se désengage de la communauté pour resserrer ses
fiers et fières de ce patrimoine de cité-jardin, qu’on activités autour de son usine. Dans les années 1950,
trouve aussi à Témiscaming et Arvida, par exemple. elle cesse de construire et de louer les maisons, elle
On voit encore son beau parc, son Cercle (un carrefour les vend. Dans les années 1960, elle cède l’hôpital au
commercial), ses édifices de style Tudor, ses rues larges ministère de la Santé, le centre communautaire à la
en courbe et son avenue d’entrée, bordée d’arbres, qui Ville et l’hôtel à des intérêts privés. Il faut attendre
relie le « moulin » et le Cercle. les années 1970 pour qu’elle se départisse du service
d’ambulance. Puis, elle transférera le terrain de golf.
Une ville ouverte?
On l’a donc vu : Kapuskasing ne doit pas être une L’Oncle Spruce, comme on l’appelle, veille au bon
ville de compagnie. Mais en quelques mois, Spruce fonctionnement de la ville. Il demeure un généreux
Falls Power and Paper finit par acheter la majorité donateur pour les projets locaux, en particulier les
des lots résidentiels, et ce, malgré l’entente signée complexes sportifs. Il continue à être perçu, en dépit
entre le gouvernement ontarien et Kimberly Clark . des intentions premières, comme le cœur de la ville.
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6 O. W. Saarinen « Provincial Land Use Planning Initiatives in the
Town of Kapuskasing. », Urban History Review / Revue d’histoire
urbaine, vol. 10, no 1, juin 1981, p. 1–15. https://utpjournals.press/
doi/10.7202/1019152ar 7 Ibid.
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