Page 124 - La Généalogie retrouver ses ancêtres
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LES ANCIENS CANADIENS 125
La Grand'Loutre regardait tout ce qui se passait d'un air de
défiance, et continuair néanmoins à fumer stoïquement.
- Mon frère veut-il à présent me vendre sa part du prison-
nier? dit Dumai•.
- Qu'en veux-ru faire? repartit le sauvage.
- Le vendre au capitaine d'Haberville qui le fera pendre
pour avoir brûlé sa maison et son moulin.
- Ça fait plus de mal d'être brûlé: d'HabervilJe boira la
vengeance avec autant de plaisir que Talamousse a bu ton
eau-de-feu.
- Mon frère se trompe, le prisonnier souffrira tous les
tourments du feu comme un guerrier, mais il pleurera comme
une femme si on le menace de la corde: le capitaine d'Haber·
ville le sait bien.
- Mon frère ment encore, répliqua la Grand'Louere: tous
les Anglais que nous avons brûlés pleuraient comme des lâches,
et aucun d'eux n'a entonné sa chanson de mort comme un
homme. Ils nous auraient remerciés de les pendre: il n'y a
que le guerrier sauvage qui préfère le bûcher à la houre d'être
pendu comme un chien.
- Que mon frère écoute, dit Dumais, et qu'il fasse attention
aux paroles du vjsage-pâle. Le prisonnier n'est pas Anglajs,
mais Ecossais; et les Ecossais sont les sauvages des Anglais.
Que mon frère regarde le vêtement du prisonnier, et il verra
qu'il est presque semblable à celui du guerrier sauvage.
- C'est vrai, dit la Grand'Loutre: il n'étouffe pas dans ses
habits comme les soldats anglais er les soldats du Grand Onon-
thio qui demeure de l'autre cllté du grand lac; mais, qu'est-ce
que ça y fait?
- Ça y fait, reprit le Canadien, qu'un guerrier écossais aime
mieux être brûlé que pendu. Il pense, comme les peame-rouges
du Canada, qu'on ne pend que le. chiens, et que s'il visitait le
pays des âmes la corde au cou, les guerriers sauvages ne vou-
draieur pas chasser avec lui,